« Il apparaît clairement, après une activité tendue ces derniers jours, un très fort ralentissement de l’activité, notamment sur les marchés de gros où il a été constaté une baisse ce matin de 40 % des ventes », estime Interfel dans un communiqué diffusé ce lundi 23 mars 2020. L’interprofession des fruits et légumes note également une « grande difficulté sur la commercialisation des produits de saison en particulier pour l’asperge et la fraise, en raison du manque de demande sur ces produits ».

Des prix « anormalement bas »

Le même jour, le réseau des nouvelles des marchés (RNM) de FranceAgriMer a déclaré les asperges, fraises gariguettes et fraises rondes en situation de « crise conjoncturelle ». Cette dénomination intervient lors d’une situation de prix à l’expédition « anormalement bas pendant 2 ou 5 jours ouvrés consécutifs » selon le produit (1). Dans ce cadre, des dispositions de modération des marges de distribution sont prévues, au plus tard dans les trois jours ouvrés.

 

Toujours le 23 mars via communiqué, l’AOPn Fraises de France appelle les Français à « acheter des fraises françaises » par solidarité, dans un contexte où les produits frais sont « délaissés ». « Faute de main-d’œuvre, les fraisiculteurs souffrent particulièrement, estime l’AOPn. À cela vient s’ajouter le problème de la demande qui s’est effondrée alors que les agriculteurs travaillent toujours dans leurs champs. Cette situation peut devenir catastrophique : problème d’acheminement et prix en baisse font craindre le pire aux producteurs français pour la pérennité de leurs exploitations. »

« Peur de jeter »

« Aujourd’hui, la peur réelle est de devoir jeter des fraises, a déclaré Jean Bélenguier, agriculteur provençal, à l’AFP. Le marché de gros en France et à l’étranger est quasi inexistant depuis une semaine. On passe vraiment un appel aux gens pour acheter les produits français afin qu’on ne se retrouve pas à jeter. »

 

Sa ligne de tri pour les asperges est à l’arrêt. « On ne récolte plus car on ne vend pas », explique l’agriculteur, qui ne cache pas « avoir peur de la suite ». Dans le frigo, une tonne et demie attend preneur. Avant l’épidémie de coronavirus qui frappe particulièrement l’Europe, il exportait en Suisse en plus de la vente en France, mais tout s’est arrêté.

Faire appel à d’autres corps de métier

« Aujourd’hui, nous sommes en relation avec l’ensemble de la distribution française pour avoir l’origine France en évidence pour le consommateur, ainsi qu’une mise en avant des produits sensibles tels que la fraise et l’asperge », déclare Jacques Rouchaussé, président de Légumes de France. Il note cependant une main-d’œuvre saisonnière étrangère qui « fait défaut ».

 

Habituellement, de nombreux travailleurs viennent de l’Espagne, du Maroc, de la Pologne. « Mais beaucoup sont restés dans leur pays, et nous sommes donc démunis. Nous essayons de faire appel au renfort d’autres corps de métier au chômage partiel comme les pépiniéristes et horticulteurs », ajoute-t-il, précisant que la filière de la salade est également impactée dans le Sud.

 

La coopérative Savéol a pour sa part déclaré dans un communiqué de presse diffusé ce 23 mars 2020 que les premières fraises de la saison sont récoltées « dans des conditions adaptées ». Deux tonnes de fraises ont été offertes ce week-end aux personnels soignants des hôpitaux de Brest.

(1) Deux jours dans le cas de la fraise et de l’asperge.