ÀNotre-Dame-de-la-Rouvière, dans les Cévennes gardoises, les parcelles s’étagent en terrasses. Entre deux cultures d’oignons doux, elles portent du seigle, qui met un peu de vert dans le paysage hivernal. « Ici, les parcelles couvrent en moyenne 400 m². À deux, pour arriver à 15 000 m², nous avons dû en rassembler une trentaine », explique Jérôme Fesquet.
Dans cette région escarpée où il y a peu de terres cultivables, le développement de l’oignon doux a permis à des jeunes de rester vivre au pays. « Ce produit est bien valorisé grâce à une AOP et à une coopérative dynamique, Origine Cévennes. Dans notre commune de 430 habitants, il fait vivre une dizaine de familles. L’école primaire rassemble encore une trentaine d’enfants », souligne l’agriculteur, qui en est le maire.
Installé en 1997, il a pris le relais de son pèrequi produisait des lapins et des oignons doux. Après avoir modernisé l’élevage, il a repris des parcelles qui se libéraient pour produire plus d’oignons. En 2013, il a fallu faire un choix. « Les résultats de l’élevage se dégradaient, poursuit-il. Pour continuer la production, je devais investir à nouveau. J’ai préféré tout miser sur l’oignon. » C’est alors qu’il rencontre Jérôme Daumet. « Je travaillais comme artisan maçon dans l’Hérault, mais j’avais envie de changer de vie, raconte ce dernier. La famille de ma compagne avait des terres à Notre-Dame-de-la-Rouvière. J’avais le projet d’y cultiver des oignons doux. » L’idée de s’associer a germé. « J’avais déjà le matériel de culture : un séchoir de 8 tonnes et une chambre frigorifique de 25 tonnes », détaille Jérôme Fesquet. De son côté, Jérôme Daumet amenait de nouvelles parcelles situées à 5 km, au hameau de Cabriès.
En 2014, Jérôme Daumet a intégré l’EARL Le Gaillou. « Nous avons remis progressivement en culture les terrasses à Cabriès, relate Jérôme Fesquet. Et, cette année, nous avons investi dans un nouveau séchoir de 30 tonnes, installé dans l’ancien bâtiment d’élevage. » Les deux associés se sont équipés en même temps de palox, pour mécaniser la manutention des oignons après la récolte et réduire ainsi la pénibilité.
Travail manuel
La culture de l’oignon doux, très technique, demande un savoir-faire. « Je suis encore en phase d’apprentissage ! » affirme Jérôme Daumet. « Nous produisons nos propres plants, que nous repiquons manuellement, explique Jérôme Fesquet. C’est une étape délicate. Pour obtenir une majorité d’oignons entre 60 et 90 mm de diamètre, il faut les espacer très régulièrement. »
La conduite de l’irrigation est également déterminante pour le calibre. Pour irriguer, les associés stockent l’eau durant l’hiver dans de petits bassins. Ils sécurisent ainsi le rendement. La qualité, elle, doit être irréprochable, pour limiter la catégorie II à un faible pourcentage. La culture, exigeante en travail manuel, nécessite 3 500 heures par hectare. « Pour le repiquage, nous embauchons six personnes durant deux semaines, et pour la récolte, huit personnes durant trois semaines », précise Jérôme Fesquet.
Après le passage au séchoir, les oignons sont stockés au froid, puis préparés tout au long de la saison de commercialisation, qui dure d’août à mars. « Nous utilisons une peleuse pour dégrossir le travail, détaille-t-il. Le tri et la finition se font à la main. Nous y consacrons deux à trois jours par semaine, de façon à approvisionner régulièrement la coopérative avec des oignons prêts à être conditionnés et expédiés. »
L’implantation d’engrais verts entre deux cultures d’oignonsprotège la structure du sol et étouffe les adventices. Cependant, au fil des années, les rendements se tassent malgré tout. « Pour faire une rotation, nous intercalons sur 10 % de nos surfaces du tournesol semence ou des pommes de terre. Mais leur rentabilité n’a rien à voir avec celle de l’oignon doux », note Jérôme Daumet. Pour maintenir le volume produit chaque année, indispensable au revenu, tout en allongeant la rotation, il faudrait plus de surfaces. Cela fait partie de leurs projets. « Nous voudrions monter à 20 000 m² », précisent les associés. Jérôme Daumet envisage également de développer l’agritourisme. « Nous sommes à proximité du massif de l’Aigoual, il y a des possibilités ! », affirme-t-il.