La route, qui conduit à Tourrettes, petit village haut perché du pays de Fayence dans le Var enchaîne boucles et virages serrés. S’y rendre exige de quitter la départementale 19. « Notre commune ne se traverse pas », sourit Camille Bouge, le dynamique maire de cette municipalité de trois mille âmes.

Beaucoup moins fréquenté que les plages du littoral, l’arrière-pays varois doit se parer d’atours pour capter le flux de touristes. En 2013, l’édile a eu l’idée de transformer la commune en « musée à ciel ouvert ». À l’époque, un petit noyau dur d’artistes y occupait un local, mais ils s’apprêtaient à partir en raison de difficultés financières. Dont acte. Camille Bouge et son conseil municipal échafaudent un plan.

« Nous avons identifié tous les rez-de-chaussée de maisons communales susceptibles de devenir des ateliers, explique Camille Bouge. L’ancienne mairie possédait également un local vacant. Toutefois, proposer un lieu, c’est bien mais pas suffisant pour convaincre. Aussi, nous avons fixé un loyer modeste de cent euros mensuel. » En contrepartie, leurs occupants doivent rester ouverts une bonne partie de l’année. La recette a fonctionné.

« Le succès attire le succès »

Aujourd’hui, une dizaine de galeries animent le cœur de ville. Céramiste, peintres, verriers, sculpteurs… présentent leur création dans ces charmantes maisonnettes réhabilitées. Mais, ici l’art ne s’expose pas seulement à l’intérieur. Avec le soutien d’acteurs privés, la municipalité désireuse d’affirmer sa vocation culturelle, a imaginé un parcours muséal en plein air.

Trois musées regroupant des collections données par les artistes à la municipalité ont vu le jour au cours de ces dernières années ( © Chantal Sarrazin)

Les œuvres de 70 artistes de tous horizons jalonnent les ruelles escarpées du village. Ici une toile représentant tantôt un paysage, un animal, un portrait mais aussi des sculptures ainsi que des installations colorent la découverte des lieux. Chaque pièce est numérotée et détaillée comme dans un « vrai » musée. « Le succès attire le succès, se félicite Camille Bouge. Nos initiatives ont eu de l’écho à l’extérieur et d’autres artistes nous ont proposé d’installer leurs œuvres chez nous. »

Le sculpteur et peintre Denis Baston a ainsi fait donation d’une cinquantaine de pièces d’envergure en bronze et en métal à la mairie qui les expose dans un bâtiment rénové et transformé en musée. Au décès de son époux, la veuve de l’artiste marseillais Paul-Maurice Perrier-Morillon a également cédé une partie d’une collection à Tourrettes qui en a de nouveau profité pour créer un musée. Elle a également hérité de peintures de l’artiste peintre Thomas Ostoya.

L’art ayant fini par attirer du monde, Camille Bouge a appliqué cette politique des petits loyers à d’autres bâtiments pour favoriser l’ouverture de restaurants. Trois établissements ont ouvert. Dès le printemps, les tablées se remplissent de visiteurs.