Le marché national de la sous-traitance de travaux agricoles atteint aujourd’hui 4,4 milliards d’euros par an. 7 % du total des exploitations agricoles délèguent aujourd’hui intégralement les travaux de cultures. Les raisons diffèrent selon les fermes et les régions.

 

À l’occasion d’une conférence de presse de la Fédération nationale des entrepreneurs des territoires (FNEDT), le sociologue François Purseigle, spécialiste du monde agricole, a présenté la dynamique d’évolution de la sous-traitance de travaux agricoles.

Transition agroécologique et spécialisation des exploitations

Le recours au travail à façon connaît une forte croissance depuis la fin des années 1990. Entre 2000 et 2016, le nombre d’exploitations agricoles faisant appel à des entreprises de travaux agricoles (ETA) aurait augmenté de 53 %.

 

Parmi les nouveaux clients des ETA se trouvent de nombreux agriculteurs qui font évoluer leurs méthodes de production dans un cadre de transition agroécologique. Le test de matériels innovants avant d’investir contribue à l’augmentation du travail à façon. Le coût de ces technologies est aussi parfois prohibitif et contraint des agriculteurs à ne pas s’équiper en propre. C’est de plus en plus le cas de la pulvérisation par exemple.

Une clientèle en évolution

François Purseigle évoque « le passage d’une sous-traitance de capacité à une sous-traitance stratégique ». Le professeur de l’Institut national polytechnique de Toulouse rappelle que la « délégation des travaux ne veut pas dire délégation de la gestion de l’exploitation ». Les petites exploitations peu ou pas équipées, clientes traditionnelles des ETA sont rejointes par de plus grosses structures.

 

C’est le cas par exemple d’un nombre grandissant de fermes en polyculture-élevage. Elles délèguent ainsi plus ou moins partiellement les travaux de cultures pour se concentrer sur les productions animales. Cela explique un important dynamisme du marché en Bretagne, où 13 % des exploitations délèguent intégralement les travaux de culture.

Délégation par abandon

Les difficultés de transmission des exploitations expliquent également l’augmentation de la sous-traitance des travaux dans certaines régions. De nombreux agriculteurs en fin de carrière ne trouvant pas de repreneurs font appel à des entrepreneurs pour l’ensemble des travaux.

 

Le terme de délégation par abandon est utilisé pour définir ce cas de figure. Il est très élevé dans certains départements en déprise agricole. Ainsi, 10 % des exploitations de l’Aube sont dans ce cas de figure. Ce chiffre atteint 14 % en Haute-Garonne dont 23 % de celles en grandes cultures. Dans l’Eure, plus de 20 000 hectares sont en délégation intégrale.

 

Des craintes pour l’avenir

Malgré le dynamisme de leur marché, les ETA craignent des décisions qui pourraient fortement menacer la filière. Ce serait le cas d’un passage du GNR au blanc qui les mènerait « dans le mur », avertit Gérard Napias, président de la FNEDT. La profession redoute également une obligation de permis pour la conduite de tracteurs ou la suppression du dispositif d’exonération de charges patronales pour l’emploi des travailleurs saisonniers (TODE) menacé par les pouvoirs publics. « On continuera à se battre à ce sujet », prévient Gérard Napias.