Dans sa décision en date du 14 mars 2024, le ministère de l’Agriculture autorise la mise sur le marché de l’Avanza jusqu’au 11 juillet 2024, indiquant que ce pesticide est « très toxique pour les organismes aquatiques » et « entraîne des effets néfastes à long terme ». C’est la quatrième année consécutive que le ministère octroie cette dérogation à la demande du Syndicat des riziculteurs de France, a précisé à l’AFP le cabinet de la ministre déléguée Agnès Pannier-Runacher.

Aire de captage d’eau potable

La maire des Saintes-Maries-de-la-Mer, Christelle Aillet (Les Républicains), a appris « avec incompréhension et effarement » cette décision. Elle explique dans un communiqué que même s’il est stipulé que la pulvérisation doit s’effectuer « en dehors d’un périmètre de protection de captage pour l’alimentation en eau potable », l’évacuation des eaux usées agricoles se fait vers « les étangs du système Vaccarès, soit vers le Rhône et le Petit Rhône », précisément où se situe la zone de captage de l’eau potable de sa ville.

« En l’absence de garantie ou d’éclaircissement, la commune se réserve le droit d’attaquer en référé suspension cette décision devant la justice administrative », ajoute-t-elle.

6 substances actives en France, 31 en Inde et au Pakistan

Les Écologistes de Provence-Alpes-Côte d'Azur réclament eux dans un communiqué « l’abrogation immédiate de la dérogation accordée », dénonçant « une grave atteinte portée à la santé humaine comme à la biodiversité animale et végétale ».

« Les eaux ainsi polluées ne peuvent dès lors plus servir à alimenter en eau douce l’étang de Vaccarès — qui présente déjà une salinité trop importante — et les nombreuses fuites non contrôlables autorisent la dissémination des substances toxiques dans l’environnement », relèvent-ils.

Sur la toxicité, « toute la question est de savoir à quelle dose on l’utilise et dans quelles conditions », insiste le cabinet de la ministre, et des consignes « strictes » sont données « pour éviter au maximum les impacts environnementaux et pour la santé publique ». Le gouvernement n’envisage pas « à ce stade » de revenir sur la dérogation car il s’agit d’un « produit vraiment nécessaire pour les riziculteurs de la Camargue qui n’ont à leur disposition que six substances actives » quand l’Inde et le Pakistan, d’où la France importe près de 40 % de sa consommation en riz, « en ont 31 ».

La Grèce, l’Italie, le Portugal et l’Espagne ont également mis en place cette dérogation, selon cette même source.

Un « procès d’intention » selon le Syndicat des riziculteurs de France

Interrogé par l’AFP, le Syndicat des riziculteurs de France précise que la filière utilise l’Avanza face « aux impasses », « quand on a une invasion de mauvaises herbes et pas d’autres solutions phytosanitaires ».

Son président, Bertrand Mazel, s’inquiète de ce qu’il considère comme un « procès d’intention » qui pourrait « flinguer une filière ». « Si dans certains pays, ils utilisent beaucoup plus de pesticides […] et qu’en France on arrête la production et qu’on importe, est-ce qu’on va régler le problème ? », s’est-il interrogé auprès de l’AFP.

Le problème est d’ailleurs plus large en Camargue, selon lui, où la gestion de l’eau est un enjeu crucial face à la salinisation des terres liée au réchauffement climatique.