Malgré une accélération ces dernières années, le déploiement de l’électricité renouvelable accuse toujours un retard en France par rapport aux objectifs fixés. C’est ce qui ressort du baromètre de 2023 des énergies renouvelables électriques en France publié le 25 janvier 2024 par l’organisme indépendant Observer’ER, en collaboration avec la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) et l’Agence de la transition écologique (Ademe).
Avec 28 % de part des énergies renouvelables dans sa consommation d’électricité en 2022, le pays franchit avec deux ans de retard l’objectif de 27 % qu’il s’était fixé. En 2023, la France n’a raccordé que 4,5 gigawatts (GW) d’électricité verte supplémentaire au réseau. C’est moins qu’en 2022 (5,3 GW). Elle reste ainsi mal partie pour respecter sa trajectoire, et son engagement de 40 % de la consommation électrique d’origine renouvelable en 2030.
L’autoconsommation dynamise le photovoltaïque
Avec plus de 3 GW nouvellement raccordés en 2023, le photovoltaïque réalise une très bonne année. À la fin de septembre, le parc photovoltaïque développait une capacité de près de 19 GW pour l’ensemble du territoire français (outre-mer compris), soit 2,3 GW de puissance additionnelle depuis le début de l’année.
Longtemps en retard, le secteur a redressé la barre depuis 2021, au point de devenir un véritable moteur pour tout le secteur, révèle le baromètre. Il est aujourd’hui dans la bonne trajectoire pour atteindre l’objectif un parc photovoltaïque national compris entre 35,1 et 44 GW à l’horizon de 2028, inscrits dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Ce défi ne peut être réalisable qu’à la condition que la filière poursuive sa croissance au rythme actuel.
Cette dynamique est principalement portée par les installations des grandes toitures ainsi que par l’autoconsommation individuelle et collective qui atteint des niveaux historiques : 48 % du total des installations photovoltaïques. Cette progression du photovoltaïque en général est la conséquence de la hausse du prix de l’électricité, à la suite du déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022, et de la levée de certains freins réglementaires qui ont accéléré l’émergence des projets.
La loi d’accélération des énergies renouvelables (loi Aper), adoptée au mois de mars 2023, ouvre également des horizons pour la filière photovoltaïque. Plusieurs simplifications ou nouveaux points réglementaires sont en faveur de son développement comme la création d’un cadre juridique pour l’agrivoltaïsme.
Toutefois, cette avancée notable reste soumise à la publication du décret d’application, vivement attendue par la filière, qui doit encore venir préciser certains points essentiels à l’instar du taux d’emprise au sol ou du pourcentage de baisse de rendement admis entre une parcelle avec ou sans panneaux solaires pour que la production agricole reste « significative ».
Un décret sur l’agrivoltaïsme qui divise (15/12/2023)
L’éolien est à la peine
L’éolien ne connaît pas la même trajectoire. Entre janvier et septembre 2023, la filière terrestre a raccordé 894 mégawatts (MW) de nouvelles capacités sur le territoire, soit environ 10 % de moins que l’année précédente sur la même période. Elle peine à dépasser le seuil de 1,5 GW de capacités nouvelles annuelles. La puissance totale installée du parc éolien terrestre serait de 21,96 GW sur la même période.
Néanmoins, la France se situe dans le peloton de tête des champions européens, derrière l’Allemagne (66,2 GW d’éolien installés à la fin de 2022) et l’Espagne (29 GW), selon les chiffres d’EurObserv’ER. Par rapport à son objectif de 24,1 GW à la fin de 2023, le secteur de l’éolien terrestre rate sa cible de plus de 1 GW.
Si la filière a rehaussé un peu son rythme de croissance depuis deux ans, l’ensemble reste trop juste pour pouvoir atteindre l’objectif national d’un parc éolien terrestre compris entre 33,2 et 34,7 GW en 2028. La projection de la tendance actuelle placerait le parc aux alentours de 31,5 GW, un chiffre certes pas très éloigné des fourchettes visées mais en deçà des ambitions affichées. Et qui risque de creuser le retard dans le développement de l’électricité renouvelable.
De son côté, l’éolien offshore accuse un gros retard sur sa feuille de route. Le secteur reste entravé par des lourdeurs administratives et réglementaires, en particulier concernant les procédures d’autorisation, qui réduisent considérablement le nombre de territoires disponibles pour de nouvelles installations.
« Au final, on estime que la filière éolienne dispose de seulement 20 % du territoire français pour se développer », indique le baromètre. Et la loi Aper censée lever les freins réglementaires qui pèsent sur le développement de nouveaux projets, avec par exemple la création de zones d’accélération des énergies renouvelables dans lesquelles les procédures sont simplifiées, ne permet pas pour l’heure de rectifier le cap.
L’injection de biogaz plutôt que la cogénération
Enfin, la filière française du biogaz a atteint les objectifs fixés par la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), mais sa croissance a ralenti en 2023. En dix ans, la France a vu s’opérer une modification profonde de la valorisation du biogaz. En 2012, la production d’électricité à partir de biogaz représentait 60 % de la production d’énergie de la filière et le biométhane 0,2 %. En 2022, la valorisation sous forme de biométhane représente 46 % du biogaz brut produit en France.
En matière électrique, le parc français représentait une puissance de 597 mégawatts (MW) en septembre 2023 (pour 1 050 installations). Sur la période allant de janvier à septembre 2023, 13 MW supplémentaires ont été raccordés et 4 MW ont été déclassés, soit un résultat stable sur un an.
Selon les chiffres d’EurObserv’ER, la production d’électricité a été décevante sur les trois premiers trimestres de 2023 puisqu’elle s’est élevée à 1,6 TWh, soit 15 % de moins qu’en 2022 sur la même période. L’enjeu pour le secteur est de poursuivre sa structuration et de trouver un modèle de développement viable.
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