« On a trouvé des preuves que c’est l’élevage de bétail, et non la culture de coca qui constitue le principal moteur de la déforestation illégale », rapportent des scientifiques colombiens et américains, dans leur article « L’expansion post-conflit de la culture de la coca et de l’élevage illicite de bétail en Colombie », publié dans la revue « Scientific reports » le 3 février 2023.
Paulo Murillo-Sandoval et son équipe ont rendu ce constat possible grâce à la télédétection par images satellitaires. « On constate une conversion récente et explosive des forêts en faveur de l’élevage de bétail illicite dans des zones protégées », expose l’équipe de scientifiques. Et cette augmentation en flèche coïncide avec la reprise du territoire par le gouvernement après la démobilisation du groupement armé des Farc en 2016. L’occasion pour les propriétaires fonciers d’accaparer les espaces désormais disponibles.
Un jeu de pouvoir
Si le bénéfice est économique – le défrichage et l’implantation de pâturages sont peu coûteux — il est surtout politique. En réalité, l’élevage de bétail permet de justifier l’existence et l’utilité des grandes propriétés foncières amazoniennes. Les ranchers acquièrent des terres pour « renforcer leur poids politique ». Par divers mécanismes légaux ou illégaux, l’enjeu est de « contrôler les gouvernements et les institutions locales ».
L’objectif ? Pousser en faveur de l’accumulation des terres. Les grands propriétaires fonciers sont ainsi favorisés par rapport aux petits exploitants grâce aux politiques foncières. Enfin, cela garantit le contrôle du territoire et des ressources, dans un contexte de conflits armés.
Une menace pour la forêt
Et si c’est l’élevage de bétail qui se transforme en outil politique pour gagner du terrain, c’est bien parce que cela semble être la seule alternative agricole viable à la culture de coca. Cultiver de la coca nécessite un espace plus restreint, alors que l’élevage demande de la place.
De fait, « l’activité s’étale dans toute l’Amazonie, et s’enfonce inexorablement de plus en plus profondément dans la forêt ». De quoi identifier cette tendance comme une nouvelle menace pour la conservation des forêts en Amazonie.