Il est encore trop tôt pour savoir comment les négociations commerciales entre les distributeurs et l’industrie agroalimentaire s’achèveront. Elles commencent à peine, mais les tensions apparues ces dernières semaines avec la pénurie de beurre ont planté le décor. Et pour une fois, la grande distribution, mise en concurrence avec d’autres débouchés, doit sortir son carnet de chèques pour réapprovisionner ses rayons.
Difficile de croire avec ce bras de fer qu’elle ait entendu l’appel du 11 octobre 2017 lancé par Emmanuel Macron. Ce jour où le président de la République a conclu la première tranche des États généraux de l’alimentation, appelant les filières à « un changement de philosophie » et à « une contractualisation rénovée », avec une charte en bandoulière pour assurer la transition en 2017.
Pour que la raison du plus fort ne reste pas la meilleure, le législateur doit rééquilibrer les rapports de forces entre les agriculteurs et leurs acheteurs. Et ne pas mettre la charrue avant les bœufs comme en 2011, avec la contractualisation laitière rendue obligatoire sans attendre que les négociations sur les organisations des producteurs (OP) aboutissent à Bruxelles. Bilan, les industriels ont mis la main sur la gestion des volumes et imposé leur prix. En face, les OP ont des pouvoirs limités et ne peuvent même pas échanger sur le prix sans s’attirer les foudres des gendarmes de la concurrence. Les producteurs d’endives en savent quelque chose.
Tous les regards, et les espoirs, se tournent vers les États généraux de l’alimentation. Mais c’est au Parlement européen que les choses bougent en termes de droit de la concurrence (voir pages 14-15). La Pac et son règlement Omnibus devraient apporter de nouvelles marges de manœuvre. Une balle à saisir pour renforcer les OP, et ne plus laisser les industriels écrire les feuilles de paie du lait. Et se demander s’il n’est pas temps pour une OP d’avoir plusieurs clients pour les mettre en concurrence et profiter aussi de l’argent du beurre.