« Nous avons aujourd’hui deux à trois jours de plus avec des températures de plus de 30 °C pendant la phase de remplissage du grain, ce qui pénalise le rendement, constate Alexis Decarrier, ingénieur régional en Champagne-Ardenne et animateur de la filière du blé tendre chez Arvalis. Ce nombre risque d’augmenter dans les années à venir. De même, la température du sol qui s’accroît, accentue le déficit hydrique. »

Si avec le réchauffement climatique, l’augmentation du rayonnement a un effet positif sur le rendement, les pics de températures et les périodes de forte sécheresse ont un effet négatif plus important. Pour les ingénieurs d’Arvalis, la solution pour atténuer le réchauffement du climat chez les céréales passera par une combinaison de leviers.

Ne pas semer trop tôt

« Pour éviter les phases de températures échaudantes de la fin de juin et de juillet, on peut retenir des variétés plus précoces, souligne l’ingénieur. Il pourrait aussi être tentant de semer plus tôt les céréales, pour les récolter plus tôt. » Mais pour lui, c’est une fausse bonne idée. « Nous avons moins de jours de gel qu’il y a dix ans, mais le risque de gel en sortie d’hiver existe toujours, indique-t-il.

Or si le blé résiste à –12 à –15°C pendant l’hiver, à la reprise de végétation, il est sensible dès que les températures descendent à –4 ou – 6°C. La période optimale pour les semis de blé reste du 1er au 20 octobre dans les zones Nord ». Avant, les semis sont aussi exposés au risque de jaunisse nanisante de l’orge. Après, le potentiel de production est pénalisé.

Des variétés plus tolérantes

« Une autre stratégie peut être celle de l’évitement, explique Charlotte Boutroy, ingénieur régional Hauts-de-France chez Arvalis. Certaines variétés disposent d’un réseau racinaire plus développé, d’autres ferment plus vite leurs stomates quand il fait chaud. La sélection peut aussi porter sur la tolérance des variétés à supporter par leur métabolisme, le sec ou les fortes températures ». Dans les essais d’évaluation des variétés de blé en post-inscription en 2022, en situations de fort déficit hydrique, elle a noté une perte de rendement moyenne de 28 q/ha, mais de 32 q/ha pour la variété la plus sensible, et de 25 q/ha pour la moins sensible.

Jouer sur la durée de remplissage des grains, est aussi une piste évoquée. Le programme de recherche FSOV Phèdre, a montré que pour certaines variétés, le remplissage s’arrête un peu avant 700°C jour après l’épiaison, alors que pour d’autres, il va jusqu’à 850°C jour.

Jouer sur le sol

« Augmenter la teneur en matière organique du sol, permet aussi d’améliorer sa réserve utile en eau, surtout dans les sols sableux ou superficiels, note Elodie Gagliardi, ingénieur régional Hauts-de-France chez Arvalis. C’est moins vrai en sols limoneux dans le Nord. Face au stress hydrique, l’impact du tassement sur la capacité du sol à stocker l’eau, sur sa porosité et sur son exploration par les racines, est par contre plus important. Avec une culture de printemps, le tassement peut provoquer de –20 à –35 % de perte de rendement. » Elle estime aussi que les couverts permettent en général de conserver un meilleur état de structure superficiel du sol. Mais elle préconise de les détruire deux mois avant le semis des cultures de printemps.