« Je vais faire partir un lot de 25 agneaux, cette semaine », explique Bruno Damiens, éleveur dans l’Ardèche et adhérent de la coopérative Agneau du soleil. C’est un début de soulagement après l’arrêt total de la collecte à la fin du mois de mars avec le confinement à cause du coronavirus.

 

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Changement d’abattoir

« Les animaux seront abattus à Sisteron en revanche et non à Aubenas, l’abattoir habituel, précise Bruno Damiens. Nous ne savons pas du tout quel prix nous serons payés. C’est un coup dur pour nous. Les agneaux que nous vendons actuellement ont demandé beaucoup de travail. J’ai passé le réveillon de Noël dans ma bergerie pour assister mises bas. »

 

La grille des plus-values, mois par mois, devrait être maintenue. « Nous n’avons, en revanche, aucune idée du niveau du prix de base auquel cette plus-value sera ajoutée », souligne-t-il, signalant que le Sud-Est est une région forte consommatrice de viande ovine. L’habitant du Sud-Est consomme 7 kg/an en moyenne contre 2,1 kg/an au niveau national.

 

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Les techniciens de la coopérative Agneau du soleil gardent néanmoins le contact avec les éleveurs par SMS. La semaine dernière, le message était le suivant : « La semaine prochaine est votre tour, pour la collecte. La situation est tellement catastrophique que nous ne savons pas si nous allons collecter. Néanmoins, au cas où, il est indispensable que vous nous envoyez vos prévisions d’agneaux très précises avant jeudi midi. Tous les agneaux annoncés ne seront pas collectés. Quant au prix, il nous est totalement impossible de vous l’annoncer. Notre seul but est d’essayer de vous enlever les agneaux mais comme à son habitude votre coopérative fera le maximum pour vous payer au mieux. »

« Les acheteurs se manifestent au coup par coup »

« Nous avons peu de visibilité, observe Denis Perreau, de la Confédération paysanne. Les acheteurs se manifestent au coup par coup. La situation se révèle compliquée pour tous les acteurs du marché et les importations, néo-zélandaises notamment, commandées avant le confinement vont peser sur le commerce. »

 

Une grande inconnue demeure quant au niveau de la consommation pendant les fêtes pascales. « Elle ne sera pas à la hauteur de celle des années précédentes, avance Denis Perreau. La moitié des rayons « tradition » ont fermé dans les grandes surfaces. Dans les coopératives, les ramassages s’adaptent. « Certaines n’ont collecté qu’un quart des prévisions, une autre dans l’Est est à la moitié », ajoute-t-il.

 

La vente en circuit court semble être la gagnante de la situation. Cela reste relatif, car les volumes concernés sont modestes. « La demande en vente directe pour les prochains mois croît aussi, ajoute Denis Perreau. Les ménages auront-ils encore les moyens de nous payer alors qu’ils seront au chômage partiel ? » Les élevages bio sont moins bien lotis. « Les plus-values de prix ne sont pas à la hauteur des contraintes de production. Cette marchandise souffre aussi de la fermeture des rayons traditionnels dans les GMS. »

 

L’engorgement risque de perdurer. « Même si la sortie des agneaux de Pâques est ralentie, ces agneaux se retrouveront dans les prochaines semaines sur le marché en même temps que les premiers agneaux d’herbe qui auront la préférence des acheteurs », estime Denis Perreau.