« Le volume des importations d’éthanol non carburant […] en provenance du Pakistan depuis 2021 perturbe gravement le marché […] de l’Union », constate la Commission européenne dans un règlement d’exécution du 19 juin 2025, publié au Journal officiel de l’Union européenne le lendemain. Elle y réinstaure de fait, pour deux ans, les droits de douane applicables aux importations d’éthanol non carburant auxquels le Pakistan n’était jusqu’alors pas soumis.
Dans son règlement, la Commission rapporte un repli de la production européenne d’éthanol non carburant de 10 % entre 2021 et 2022, puis de 9 % en 2023, avant un léger redressement en 2024. Elle est toutefois restée inférieure de 8 % à celle de 2021. L’institution parle aussi, d’après des « prévisions indépendantes », du recul des parts de marché des producteurs de l’Union, passant de 73 % en 2021, à 67 % en 2022 puis à 66 % en 2023. Elles seraient remontées à 73 % en 2024, mais devraient « diminuer en 2025 en raison de la baisse de la production et de la consommation », note-t-elle.
Prix pakistanais attractifs
« Au cours de cette période, le prix des importations pakistanaises [d’éthanol non carburant] était systématiquement inférieur au prix de vente de la production de l’Union », et même « nettement inférieur » en 2024, d’environ 25 %, ajoute-t-elle. Cet écart de prix n’était « que » de 7 % en 2021, selon l’institution.
« Les volumes pakistanais importés ont été multipliés par trois entre 2021 et 2022, à près de 5 millions d’hectolitres », chiffre Vincent Guillot, directeur de l'environnement à la CGB (Confédération générale des planteurs de betterave). À titre de comparaison, « la consommation européenne d’éthanol non carburant était de 26 millions d’hectolitres en 2024, complète Sylvain Demoures, secrétaire général de Bioéthanol France. Et la production totale de l’Union européenne et du Royaume-Uni (carburant et non carburant) s’élève environ à 80 millions d’hectolitres ».
Décision jugée tardive par les producteurs européens
« C’est dans le cadre du règlement SPG + (pour « système des préférences généralisées ») que le pays était exempté de droits de douane. Il est accordé à certains pays qui souffrent d’une intégration insuffisante au commerce mondial, en échange d’un certain nombre de conditions relatives notamment aux droits sociaux, explique Vincent Guillot. Ce règlement prévoit tout de même des clauses de sauvegarde ». Celles-ci avaient été sollicitées par plusieurs États membres et parties prenantes de l’industrie de l’éthanol européenne à plusieurs reprises.
« Cette décision marque une étape importante vers le rétablissement d’une concurrence loyale, a réagi le 20 juin 2025 ePURE, association qui représente les producteurs européens. Malheureusement, elle intervient après un délai extrêmement long ». L’industrie européenne indique avoir demandé d’allonger la suspension à trois ans.
« ePURE garde par ailleurs un œil sur de possibles exportations des États-Unis qui transiteraient par d’autres pays pour s’affranchir de droits de douane auxquels elles sont normalement soumises », signale Vincent Guillot. Le pays ne jouit pas d’un quelconque accord mais il parvient quand même à exporter à des prix des inférieurs au marché de l’Union européenne, de 35 % d’après la Commission européenne.