« En Europe, du point de vue de la production, c’est assez contrasté, indique Arthur Boy, chargé de mission pour l’économie à l’AGPM (Association générale des producteurs de maïs). En France, on devrait relativement bien s’en sortir, bien que les résultats soient hétérogènes selon les dates de semis ou selon les régions. Le Poitou-Charente a par exemple été pénalisé par un été sec. Mais la moyenne française devrait se situer dans la moyenne quinquennale, ce qui est une exception au niveau européen. »

Arthur Boy, chargé de mission pour l’économie à l’AGPM (Association générale des producteurs de maïs). (©  AGPM)

« Il y a eu un manque de pluie dans les bassins du Danube et de la mer Noire, poursuit-il. Hongrie, Serbie et Bulgarie ont souffert en outre d’un été très sec et chaud. L’Ukraine, quatrième producteur de maïs mondial, a souffert dès le printemps. Dans cette zone, seule la Pologne s’en sort, mais moins bien que la France. »

« La production européenne avoisinera donc, selon les estimations, les 60 à 62 millions de tonnes en 2024, contre une moyenne à 65 millions. L’Europe étant déjà très importatrice habituellement, comment va-t-on sourcer nos besoins, avec ce déficit de 15 à 20 millions de tonnes cette année ? On risque de voir arriver la concurrence de blés et d’orges du fait d’une disponibilité accrue de ces céréales en lien avec une dégradation de la qualité. Les utilisateurs vont se tourner vers ces matières premières pour combler leurs besoins. »

Retour aux achats

« Au niveau français, la particularité des prix des derniers mois était qu’on ne suivait pas la tendance à la baisse de Chicago car on était tenus par des prix élevés en blé, indique Arthur Boy. Ce support fragile, qui faisait office de prix plancher pour le maïs, a été perdu au début d'août, quand les acheteurs — notamment d’Egypte —, ont émis leurs appels d’offres en blé. Les prix du blé français se sont alors ajustés pour être compétitifs, tandis que les prix du maïs en Europe renouaient avec ceux de Chicago, avec des répercussions aussi sur le marché physique. »

« Depuis une semaine, les prix du maïs ont tendance à remonter avec les acheteurs internationaux qui soutiennent les prix à Chicago, poursuit l’expert. Après une année 2023 marquée par une baisse des achats chinois aux États-Unis, les acheteurs internationaux sont en train de revenir vers les origines américaines. Et l’euro, qui a tendance à s’affaiblir, nous fait du bien. L’écart de compétitivité qui s’était creusé au cours de l’été face au rouble ou au dollar, et qui pénalisait les céréales européennes à l’exportation, a donc tendance à se résorber aujourd’hui. »

« Le niveau de prix reste cependant relativement bas sur cette campagne au regard des coûts engagés par les producteurs de maïs. Et il n’y a pas de raison que l’on décolle à moyen terme du prix actuel, à moins que la Banque centrale européenne (BCE) accélère sa politique de taux à la baisse. »

Bilan mondial confortable

« Au niveau mondial, le bilan est relativement confortable depuis l’an dernier, situe Arthur Boy. Les stocks américains, qui s’élevaient à 47 millions de tonnes en 2023-2024, avaient beaucoup détendu le marché mondial. Et même si les surfaces de maïs ont été réduites aux États-Unis, le record en termes de rendement est quasiment assuré, ce qui ne permettra pas aux stocks de se dégonfler. Ils sont évalués autour de 53 millions de tonnes. Du côté de l’Amérique du Sud, la récolte est correcte au Brésil, et la production a rebondi en Argentine cette année. Le disponible exportable y reste relativement conséquent et compétitif. »