Le marché des céréales reste englué dans une offre mondiale abondante, une forte concurrence entre les différentes origines et une demande assez peu dynamique.
Blé : les origines européennes pénalisées par la fermeté de l’euro
L’achat au cours de la semaine de 660 000 tonnes de blé par l’Algérie (chargement en janvier) n’est pas parvenu à redonner des couleurs aux blés français. Le rendu Rouen reprend à peine 1 €/t sur une semaine, à 155 €/t, tandis que le contrat de décembre d’Euronext reste stable, à 161,5 €/t. L’Algérie reste la locomotive des exportations françaises hors de l’UE depuis le début de la campagne, en partie parce que ce débouché est inaccessible au blé russe, en raison des spécifications du cahier des charges algérien sur les blés punaisés.
Mais, derrière la locomotive, les wagons sont peu nombreux. Les chargements français atteignaient environ 2 millions de tonnes (Mt) sur la période de juillet à -octobre, dont plus de 1,2 Mt à destination de l’Algérie. La Russie continue en effet d’écraser la concurrence et affiche un rythme record à l’exportation. La remontée des prix russes en septembre a permis à l’origine France de regagner en compétitivité, mais la compétition reste très rude, surtout avec le boulet que constitue le raffermissement de l’euro.
Le blé français va devoir en outre compter avec l’arrivée du blé argentin en décembre. Si la qualité est bonne, cette origine sera en mesure de compliquer la tâche de la France sur l’Algérie (y compris pour l’achat mentionné ci-dessus, qui porte sur des origines optionnelles), tandis que le blé US est aujourd’hui attractif sur le Maroc à partir de janvier, en cas d’ouverture du quota à droit réduit prévu pour cette origine. Quant à l’Égypte, l’appel d’offres passé jeudi par le Gasc et remporté en totalité (230 000 tonnes) par la Russie ne fait qu’enfoncer un peu plus le clou de la suprématie russe, avec des chargeurs français échaudés par les multiples risques liés à cette destination (refus possibles de bateau, retard de déchargement, etc).
Orge : maintenant ou jamais vers la Chine
L’orge de mouture rendu Rouen a repris cette semaine 2,5 €/t, à 150,5 €/t, après avoir chuté nettement la semaine précédente. À l’inverse, le prix de l’orge fourragère Fob Moselle s’est replié de 4 €/t, à 144 €/t. Avec l’épuisement de l’origine ukrainienne, la France pourrait avoir une carte à jouer sur la Chine (la Russie ne faisant pas partie des origines autorisées en Chine), et profiter de la fenêtre de tir ouverte entre le retrait de l’Ukraine et l’arrivée de l’Australie. Pour en bénéficier, il faudra afficher une meilleure compétitivité que le Canada.
Sur les autres débouchés (principalement le Proche-Orient), la compétition avec la Russie reste rude. En orge de brasserie, la prime brassicole des orges d’hiver recule en raison des disponibilités importantes. Le Fob Creil en variété d’hiver perd ainsi 4 €/t. Les orges de printemps résistent mieux (–1,5 €/t, à 199 €/t), mais subissent la pression de l’arrivée des pluies en Australie, permettant d’envisager une récolte correcte en volume et bonne en qualité.
Maïs : l’érosion des prix se poursuit
Le maïs français continue à céder du terrain, pressuré par les origines extra-communautaires qui affichent un prix compétitif. Le Fob Bordeaux perd cette semaine 2 €/t, à 143 €/t, tandis que la baisse est encore plus prononcée en Fob Rhin (–3,5 €/t). À l’échelle internationale, le marché reste marqué par d’abondantes disponibilités. Le petit raffermissement en Argentine (+3 $/t), en Ukraine (+2 $/t) et aux USA (+1 $/t) ne change pas fondamentalement la donne et les importations au sein de l’UE s’annoncent très volumineuses, tandis que, dans les champs français, plus de la moitié de la récolte est achevée.
Léger recul du soja après le pic de la semaine dernière
Après la forte hausse observée jeudi la semaine dernière, les cours du soja à Chicago se sont légèrement effrités cette semaine. Ainsi, le contrat de novembre perd environ 2 $/t par rapport au pic post-publication de l’USDA. Il est à noter que la récolte se passe bien aux États-Unis, confirmant les bons rendements. Par ailleurs, les ventes hebdomadaires US ralentissent, avec une moyenne de 1,5 million de tonnes (Mt) par semaine depuis le début d’octobre contre environ 2 Mt par semaine en septembre. Des pluies sont aussi arrivées au Brésil, permettant d’accélérer les semis (même s’ils restent en retard par rapport à l’an dernier).
Dans les prochaines semaines, l’avancée des semis en Amérique du Sud sera un élément clé. En effet, aux cours actuels, les sojas US ne sont pas compétitifs sur le marché mondial pour livraison en mars/septembre 2018, et le marché nord-américain pourrait se retrouver avec des stocks très élevés. Si la récolte sud-américaine ne réserve pas de mauvaise surprise, la chute des prix US sur le printemps pourrait être importante.
Le colza hexagonal sans tendance claire
Les prix Fob Moselle du colza remontent légèrement cette semaine à 366 €/t (+3,5 €/t), tandis que le rendu Rouen est stable (à 354 €/t), et que le contrat Euronext recule de 2 €/t. Les statistiques disponibles illustrent une forte demande pour la trituration sur le début de campagne, mais les importations continuent d’empêcher toute hausse des prix. La bonne demande outre-Rhin permet de soutenir les cours dans l’est de la France.
Les cours du canola sont en hausse de presque 5 $/t cette semaine au Canada. Les récoltes ne sont pas tout à fait terminées alors que le gel et le vent arrivent, ce qui pourrait abîmer les plants encore sur pied. Par ailleurs, la bonne demande locale et à l’exportation soutiennent aussi les cours.
Le prix du tournesol est stable sur la semaine à 320 €/t à Saint-Nazaire.
Le prix français du tourteau en légère hausse, recul à Chicago
Le prix du tourteau de soja à Chicago diminue légèrement cette semaine d’environ 1,5 $/t sur le rapproché, dans le sillage des cours de la graine. Au contraire, la cotation du tourteau de soja à Montoir remonte légèrement par rapport à la semaine dernière (+4/t), réagissant avec retard à la hausse des cours mondiaux observées la semaine dernière.
Le prix du pois fourrager est en baisse cette semaine à 185 €/t départ Marne (–5 €/t), tandis que le pois jaune est maintenant coté à 197 €/t (pas de cotation la semaine dernière). La prime atteint donc 13 €/t.
À SUIVRE : perspectives de récoltes en blé de l’hémisphère Sud, évolution des taux de change, regain d’agressivité de l’origine russe en céréales, semis de soja au Brésil, récolte de soja aux USA et de canola en Australie.