Depuis une dizaine d’années, l’ergot du seigle ou Claviceps purpurea revient en force dans les céréales. Ce champignon microscopique tire son nom de sa forme allongée rappelant l’ergot des volailles. Il prend la place des grains dans les fleurs touchées au moment de la floraison. Il atteint particulièrement le seigle mais attaque aussi les triticales, les blés tendres, les blés durs, le riz et même les orges ou les avoines, pourtant moins sensibles à ses assauts. Parmi les céréales, seuls le maïs et le sorgho sont épargnés. L’ergot contamine aussi les céréales fourragères comme les fétuques, ainsi que les adventices (dactyle, chiendent, vulpin, ray-grass agrostis, pâturin…).

Effets multiples

La teneur en alcaloïdes (ergotamine, ergosine, ergocristine…) rend les sclérotes particulièrement toxiques (des drogues comme le LSD étant tirées de certains de ces alcaloïdes). Les effets sont majeurs pour les animaux et s’étendent à tous les stades : croissance, gestation (avortements en bovins, réduction des poids de naissance chez le cheval), lactation (jusqu’à l’absence totale de montée de lait en ovins) et reproduction. Ils varient toutefois selon l’espèce et la proportion des différents alcaloïdes.

Pour l’alimentation animale, la réglementation européenne fixe la limite de 1 g de sclérote par kilo de céréales non moulues (contre 0,5 g/kg pour les céréales mises sur le marché à destination de l’alimentation humaine). Au regard de la toxicité de telles doses sur les animaux, cette valeur devrait évoluer dans les années à venir. À titre d’exemple, la diminution de la prise alimentaire chez le porc est prouvée dès 0,2 g d’ergot par kilo d’aliment.

Utiliser des semences indemnes constitue une des premières recommandations d’Arvalis pour éviter d’introduire la maladie dans les parcelles. « La tolérance est de trois sclérotes ou fragments de sclérotes pour 500 g de semences certifiées. Pour un semis de 300 grains au mètre carré, cela représente 3 000 champignons pour un champ de 3 ha et des millions de spores potentiellement disséminées », chiffre Béatrice Orlando, chef de projet qualité sanitaire. La spécialiste recommande d’utiliser des semences triées pour éliminer l’ergot, voire traitées pour inhiber la germination des sclérotes.

Gare aux tours de parcelles

La présence d’adventices autour des parcelles (bandes enherbées, fossés, etc.) constitue un des facteurs principaux de contamination avec des sclérotes dix fois plus petits que ceux des céréales, et un potentiel infectieux d’autant plus important que le nombre de graines est élevé (vulpin et ray-grass en tête). Il convient donc de faucher ou broyer les bords de champs au moment de la floraison des graminées les plus présentes, ce qui limite l’effet de dispersion, mais aussi de conservation et de relais de la maladie. Yanne Boloh