« On ne fera pas de miracle mais on fait le dos rond. Et on s'adapte tous les jours », souligne Patrick Coldefy. Depuis début juillet, les trois associés de la ferme de Larcher, à Cœur-de-Causse dans le Lot, accueillent des bandes de canettes. « Nous avons aussi réussi à avoir 800 canards, mais le plus gros de la production de l'année, ce sera des canettes ». Environ 12 000 palmipèdes sont élevés, gavés et transformés chaque année. L'exploitation, avec à sa tête Patrick Coldefy, sa femme Cécile et l'une de leurs filles Emmanuelle, emploie également 8 salariés. Alors, quand ils ont vu les dégâts de l'influenza aviaire dans les couvoirs, ils ont opté sans hésiter pour des canettes. 

Les deux premières bandes de 1 100 femelles chacune sont arrivées début juillet 2022. Il a fallu s'adapter à ces animaux « plus fragiles, qui ne se comportent pas comme les mâles, souligne Cédric Celles, l'un des salariés gaveur. Les trois premiers jours, c'est compliqué, parce qu'elles voient très mal, témoigne-t-il. Il ne faut pas changer les équipements de place, comme les nourrisseurs. Environ 1 % des canes restent aveugles, et les autres voient mal. »

"Elles sont plus nerveuses"

Côté gavage, « elles sont plus nerveuses au début », assure une autre salariée, Océane Delmas. « Il faut faire attention, parce qu'elles décrochent vite, complète Pascal Coldefy. Pour ne pas les brusquer, nous augmentons la quantité d'aliment en douceur, surtout aux alentours du 4e ou 5e jour ». Ainsi, quand la portion augmente de 20 à 30 g par repas pour un mâle, il faut parfois se limiter à 10 g pour une femelle. L'élevage a dû adapter les embucs : « Nous en avons acheté de plus courts, note le chef d'exploitation. Avec ceux de 14 cm de long, les canettes rejetaient l'aliment car il n'allait pas au fond du jabot. Nous sommes donc passés à 19 cm. » Le diamètre est également plus petit. L'exploitation a changé les gaveuses, désormais hydrauliques. « C'est beaucoup plus souple pour gaver et adapté à taille de l'embuc ». Le gavage est en revanche plus long que pour les mâles. « Les canettes sont plus fragiles au niveau du jabot », explique Cédric Celles. C'est pourquoi l'aliment a été modifié. « Depuis 30 ans, nous gavons les canards avec du maïs grain. Or les canettes ne supportent pas le maïs entier. Nous sommes passés à la pâtée, à la farine. Il faut concasser le maïs, c'est un travail supplémentaire. »

Les premiers résultats ne sont « pas mauvais », déclare Pascal. Les foies des canes pèsent de 460 à 590 grammes (contre 520 grammes en moyenne pour les mâles), mais 25 % environ sont veinés, et cuisses et magrets sont plus petits. L'éleveur confirme : « tout pèsera moins. Mais il vaut mieux avoir de la marchandise, servir la clientèle et faire travailler l'exploitation. »