« En dix ans, le nombre d’exploitations laitières est en recul de 20 % au Canada, alors que la production par vache s’est accrue de 15 %, expose Nicolas Jobin. Sur la même période, le nombre de vaches laitières par exploitation est passé de 71 à 84. » Jusqu’ici, peu de différences avec le contexte de production européen. Pourtant, la filière laitière canadienne présente une tout autre politique de gestion de l’offre.

Prix garantis

La filière laitière canadienne repose sur trois piliers :

  • La planification de la production. Les producteurs sont encadrés par un quota, exprimé en kg de matière grasse par jour. « La production laitière canadienne est en quasi-totalité destinée au marché intérieur, explique Nicolas Jobin. Les éleveurs s’engagent donc à augmenter ou diminuer leur production d’une année à l’autre, selon l’évolution de l’offre et de la demande. »
  • Le prix à la production. « La commission canadienne du lait (CCL) réalise tous les ans une enquête pour construire le prix à la production. Elle se base sur le coût de production à la ferme, avec un échantillon de 220 producteurs, mais interroge également les transformateurs, détaillants, restaurateurs et consommateurs ». Le prix fixé par la CCL sert ensuite de base de négociation entre les regroupements de producteurs et les transformateurs dans chacune des provinces du pays. Le prix final pourra ainsi varier selon les provinces, en fonction de la qualité des négociations. « Un plafond de prix est cependant défini pour l’ensemble du pays, afin d’éviter la surenchère », précise Nicolas Jobin.
  • Le contrôle aux frontières. « La juridiction fédérale a établi des contingents tarifaires de 241 % pour le lait, 245,5 % pour le fromage, 237,5 % pour le yaourt et 465 % pour la crème glacée. Les enjeux commerciaux sont constants, dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, du Partenariat trans-Pacifique, ou encore de l’Alena (2). »

Des exploitations pourtant vulnérables

« L’un des plus grands enjeux demeure la gestion stratégique des finances », estime Nicolas Jobin. L’agronome observe « un coût croissant des investissements, un patrimoine par actif de plus en plus important, et un niveau d’endettement qui s’accélère. Cette situation rend vulnérable les entreprises agricoles. » Sur la période 2016-2017, les intérêts des emprunts de long et moyen terme représentaient 35,72 € par tonne de lait au Canada, contre 10,40 € en France (3).

Le coût de la main-d’œuvre est également un poste de charges important pour les éleveurs canadiens. En 2016-2017, il atteignait 81,50 € par tonne de lait au Canada, contre 17,20 € en France.

V. Gu.

(1) Association française des techniciens de l’alimentation animale.

(2) Accord de libre-échange nord-américain.

(3) Source Cogedis et Craaq (Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec).