Fin juillet 2018, le CGAAER avait été missionné pour aller à la rencontre des professionnels et autres acteurs locaux au sein de la principale zone d’élevage de ruminants à l’herbe en France. La question centrale de l’étude portait sur les conditions de pérennité économique de cette production.

De cette mission, l’organisme d’experts fait ressortir dans un rapport publié le 18 novembre 2019 trois grands axes qui font respectivement référence « aux limites de la valorisation des produits du Massif central sur les marchés, à l’urgence de reconnaître la qualité des services environnementaux et culturels fournis par l’élevage à l’herbe et le pastoralisme dans l’ensemble du Massif, à la nécessité d’une conception entièrement nouvelle de l’intervention financière publique en faveur de la pérennité de cet élevage des ruminants à l’herbe au sein du Massif ».

Des efforts de valorisation peu récompensés

Les études prospectives menées à la fois par l’Inra et FranceAgriMer ces trois dernières années sur les différentes filières de production dans le Massif central mettent en lumière « la difficulté de prévoir l’évolution des marchés, la nécessité pourtant de s’y adapter, dans le contexte d’une consommation plutôt en baisse, et, par voie de conséquence, d’une concurrence exacerbée ».

Concernant les produits du troupeau allaitant, le rapport évoque une « surproduction de viande de qualité ». Il poursuit : « Les produits sous signes de qualité semblent se faire concurrence entre eux, dans un marché étroit et peu rémunérateur, où le consommateur est sollicité par de nombreux signes distinctifs souvent mal compris. »

Le lait de montagne, constituant 10 % de la production nationale, est destiné à 60 % à la transformation fromagère. Or, « leur notoriété est variable et n’apporte globalement pas une valorisation considérable », sauf cas particulier, constatent les inspecteurs de l’administration.

L’élevage ovin connaît également de grandes difficultés et « l’avenir du pastoralisme dans le rayon Roquefort pourrait s’en trouver menacé ».

Une « reconnaissance formelle » des services environnementaux

L’élevage à l’herbe est reconnu par les spécialistes comme étant une « agriculture à haute valeur naturelle ». De ce fait, la mission recommande le développement rapide et large de la certification « haute valeur environnementale » des exploitations et des produits.

De cette reconnaissance en découlent deux objectifs : « caractériser précisément chaque système d’élevage de ruminants à l’herbe sous l’angle des services environnementaux et culturels qu’il rend d’ores et déjà » et « faire élaborer des projets agricoles de territoire […] au titre duquel les systèmes d’élevage vertueux pourraient être homologués ».

Rémunérer les services environnementaux et culturels rendus

Les inspecteurs proposent de revoir la structure actuelle du soutien public aux élevages de ruminants du Massif central pour la rendre « plus légitime et efficace ». D’après ce rapport, « il convient non pas d’aider l’éleveur dans un objectif d’exportation de produits agricoles, mais de le rémunérer par contrat pour le service rendu, s’il s’engage à pratiquer l’un des systèmes d’élevage constitutif du projet agricole de son territoire ».

La mission propose par exemple de remplacer le système d’aide actuel par un « montant de rémunération annuelle pour service rendu » de l’ordre de 875 € l’hectare. Cette mesure augmenterait de 75 % le budget alloué à l’agriculture locale et inciterait à maintenir « l’un des élevages les plus respectueux des objectifs nationaux de transition agroécologique », selon les experts.

Lucie Pouchard