Les dégâts d’oiseaux constituent une problématique majeure pour les agriculteurs, particulièrement pour le tournesol (plus d’1/3 des parcelles touchées chaque année avec 7 à 13 % de resemis, selon les enquêtes de Terres Inovia) et le maïs, qui a connu une forte pression en 2020 (7,5 % de surface concernée par des attaques de corvidés en moyenne, selon Arvalis).
Un préjudice variable selon l’espèce
Le pigeon ramier est la première espèce causant des dégâts sur tournesol suivi par les corvidés, principale problématique du maïs (corbeaux freux, corneille noire et choucas des tours).
Selon Arvalis, la réduction des solutions de traitement de semences disponibles depuis 2018 pourrait, en partie, expliquer la hausse des dégâts de corvidés sur maïs. © J.-B. Laffitte
Le préjudice est variable selon l’espèce : chez les corvidés, la perte du pied est inévitable car les oiseaux déterrent la plantule pour consommer la graine. Pour les pigeons, l’impact dépendra des parties de plantes consommées : en effet, le rendement peut être maintenu si l’apex n’est pas touché, montrent les travaux de Terres Inovia. Néanmoins, « c’est un peu du tout ou rien avec beaucoup d’aléas, ce qui renforce le risque perçu, indique Christophe Sausse, de Terres Inovia, et les agriculteurs peuvent être découragés à continuer de faire du tournesol ».
Pas de solution miracle
Sur maïs, le Korit 420 FS, à base de zirame, est disponible en tant que traitement de semences pour 2021. Son efficacité est, cependant, limitée en cas de fortes pressions et son avenir incertain avec son classement en produit toxique (H330). En revanche, sur tournesol, aucun produit homologué à usage répulsif n’existe.
« Les corbeaux agissent de la levée jusqu’au stade des 3-4 feuilles, mais parfois plus. Ils déterrent la plantule pour aller chercher la graine germée », souligne Jean-Baptiste Thibord, chez Arvalis. © S. Champion
Dans ce contexte, Terres Inovia et Arvalis testent des alternatives, comme des produits à allégations répulsives (par exemple, Avifar, préparations à base d’épices). Pour Terres Inovia, les effets sont trop aléatoires et le positionnement compliqué sur les traitements en plein. L’institut a également testé des engrais starter ainsi que l’effet variétal pour réduire la phase sensible, « sans preuve tangible aujourd’hui ». Du côté d’Arvalis, les essais maïs de 2020 n’ont pas pu être valorisés à cause de la variabilité des attaques. « Ceci révèle la difficulté d’opérer sur des essais classiques, en microparcelles », souligne Jean-Baptiste Thibord, chez Arvalis. Le dispositif sera reconduit en 2021, notamment sur des parcelles en conditions réelles. Par ailleurs, les oiseaux ont une forte capacité d’apprentissage, qui traduit les limites des dispositifs d’effarouchement actuels (à positionner au bon moment et à déplacer souvent).
Cependant, « l’absence de solution miracle ne doit pas faire oublier quelques règles simples », souligne Christophe Sausse. Une approche de protection intégrée est de mise pour le tournesol comme pour le maïs : comme des semis groupés avec les voisins dans le temps, en évitant les parcelles historiquement exposées, et dans de bonnes conditions d’implantation (semis si possible profond pour le maïs, et rappuyage correct des lignes).
La difficulté est de rendre tout ceci compatible avec d’autres paramètres comme le désherbage ou la gestion des autres ravageurs : ces leviers sont donc à adapter à chaque situation. La régulation (tir ou piégeage) est, quant à elle, possible selon le statut réglementaire des espèces (liste des nuisibles) et des spécificités départementales.
Utiliser des plantes de service ?
Chez Arvalis, « l’effet appât de plantes semées avait initialement été étudié pour lutter contre le taupin. Les résultats étaient satisfaisants, mais ils restent à confirmer pour les corvidés », précise Jean-Baptiste Thibord. Car les effets peuvent être contrastés, voire à l’opposé de l’objectif recherché (consommation du maïs après l’appât).
Chez Terres Inovia, la technique du semis sous couvert est testée depuis 2016, pour obtenir un effet de confusion. Les résultats montrent que « cela marche dans certaines situations, mais le problème est que cela se paye par une concurrence », alerte Christophe Sausse. L’orge et la féverole sont les espèces qui fonctionneraient le mieux et une destruction précoce du couvert (juste avant le semis) limiterait la concurrence. L’institut note, néanmoins, la technicité requise de cette pratique.
En définitive, la stratégie à adopter pour ces deux cultures de printemps est une combinaison de leviers, en considérant l’importance de l’échelle du paysage et en renforçant les liens avec les autres acteurs du territoire.
(1) Pour les oléoprotéagineux, le formulaire est disponible sur le site de Terres Inovia. Pour le maïs, ils sont à disposition par les organismes départementaux (DDT, CA, FDSEA, FNC…).