Àpeine arrivées sous le chapiteau, les quinze agricultrices du groupe féminin du Cernodo préparent leur accoutrement. L’une choisit des habits trop grands, l’autre trop petits, parfois trop vieux et souvent colorés à souhait. Chapeau, bretelles ou perruque, et déjà toutes se découvrent, personnellement et collectivement, différentes.
Jouer avec ses émotions
« Dès que vous mettez votre nez rouge, vous abandonnez tous vos filtres, souligne Olivier Guitel, artiste, mais aussi agriculteur à Lommoye (Yvelines). Avec cet accessoire, le clown se situe dans le monde des émotions. Ce personnage amplifie tout : la joie, la tristesse, la colère ou la peur. Il dit oui à tout, même s’il utilise avec plaisir la roublardise. » Depuis près de vingt ans, Olivier anime des stages de clown (2), dont des formations de deux jours destinées aux adultes.
« Cette expérience s’inscrit dans notre programme de travail sur la communication avec le public », ajoute Elisabeth Van de Weghe, agricultrice à Angivillers (Oise), membre du Cernodo. Notre action ne se résume pas à être drôle, mais à utiliser toute la palette d’expressions qui existe au fond de nous : être inventive, fragile, pathétique… » L’objectif est de trouver son propre clown, de le rencontrer, l’accueillir et lui réapprendre à jouer.
Il s’en sort toujours
Dans un premier temps, les stagiaires montent sur scène individuellement. Pas facile de se retrouver sous les feux des projecteurs, sans support, face à soi-même, dans un silence ponctué d’éclats de rire. Dans un second temps, place à l’écoute, l’observation et l’interaction. Les apprentis augustes expérimentent des duos et trios. « Nous n’imaginions pas avoir autant de cordes à notre arc », reconnaît Elisabeth. Maire de sa commune, elle a apprécié cette parenthèse lui dévoilant une autre facette d’elle-même, hors des conventions sociales. La réaction du clown, qui se prend « des baffes » au cours de spectacles, donne une vraie leçon de vie. Qu’importe la situation, il s’en sort toujours.
En développant l’humour, ces agricultrices ont trouvé une manière de prendre de la distance face aux aléas de la vie.
(1) Comité d’expansion rurale du nord-ouest de l’Oise.
(2) Contact : etincelle.bouillasse@gmail.com tél. : 06 60 20 57 94.