«Le 16 novembre 2016, quand nous nous sommes résolus avec mon beau-frère à mettre une annonce sur Leboncoin afin de vendre notre troupeau, je n’étais pas fier. Je craignais de ne pas trouver d’acheteur pour nos montbéliardes à 8 500 kg de lait, sélectionnées depuis des années. Cela m’aurait embêté de vendre nos laitières pour de la viande. En 2007, j’avais très mal vécu le départ de nos animaux à l’abattoir à cause de la tuberculose. Par conséquent, je tenais vraiment à ce que nos vaches partent dans une bonne maison, et qu’elles y soient bien traitées.

Après quelques coups de fil infructueux, la chance m’a finalement souri. Un éleveur du Doubs de 40 ans, dont l’étable avait tragiquement brûlé avec 37 montbéliardes à l’intérieur, s’est déclaré intéressé. Sur internet, il avait vu le pedigree de nos animaux et m’a appris qu’elles étaient bien classées au plan national. Au cours de ses visites, pendant l’hiver, une relation de confiance, puis d’amitié s’est nouée. J’avais pris soin de ne rien lui cacher. Je lui avais parlé de la tuberculose. Lui-même s’était renseigné. Le Groupement de défense sanitaire du Doubs l’avait pleinement rassuré quant à la fiabilité des contrôles mis en place en Côte-d’Or.

Le 5 mai 2017, quand nos 37 vaches en lactation, dix génisses et deux veaux, ont quitté l’exploitation, j’ai ressenti que, cette fois, la page était définitivement tournée. Le matin, j’avais trait, le cœur déjà un peu serré. Lors du départ du camion, j’étais sous le choc. Mais j’étais sûr de revoir mes animaux. Effectivement, trois semaines plus tard, en vacances avec ma femme dans le Doubs, je me suis arrêté sur leur nouveau lieu de vie. Les vaches étaient au pré. J’ai été impressionné par la facilité avec laquelle elles s’étaient adaptées à leur environnement, à 750 m d’altitude. Leur nouveau propriétaire en faisait ce qu’il voulait. Durant la période traumatisante qu’il avait dû traverser après l’incendie de son étable, la seule chose qui ait véritablement bien fonctionné, m’a-t-il confié, c’était l’acclimatation des bêtes. Apprendre que son troupeau est productif, et qu’il a aidé un éleveur à surmonter un coup dur est une grande satisfaction. Depuis, je rends visite à mes vaches plusieurs fois par an ! »

Propos recueillis par Anne Brehier