«L’homme n’est pas naturellement fait pour l’inclusion. Il est fait pour la rivalité. Dans la vie, il y a deux stratégies. La plus facile est la compétition. Si je l’avais adoptée, je ne serais pas conférencier aujourd’hui, du fait de mon handicap. L’autre voie est la coopération. C’est celle que j’ai choisie depuis ma naissance : travailler ensemble, réussir ensemble. Dans cette stratégie, il faut savoir demander de l’aide. Celle dont nous avons besoin, au bon moment et à la bonne personne. Mais la solliciter, quelle horreur dans notre société ! Pour quelqu’un qui veut être numéro 1, c’est terrible. Ça demande de reconnaître que j’ai besoin d’un autre numéro 1. La première étape quand on souffre d’un handicap est donc de reconnaître sa fragilité. C’est parfois difficile. Deuxième leçon : ne pas chercher à devenir indépendant, mais savoir gérer les interdépendances. Troisième leçon : ne pas dire “quand on veut, on peut”, mais plutôt “quand on peut, on veut”. Cela demande de se focaliser sur ses capacités. C’est là que nous donnerons le meilleur de nous-mêmes.

Aujourd’hui, en tant que conférencier, si j’interpelle et je retourne mes auditeurs, ce n’est pas tant par ce que je dis, mais par mon attitude. J’exerce avec mon handicap et non pas en dépit de mon handicap, c’est toute la différence. Ce que je vais vous dire, je suis le seul à pouvoir le faire. Une personne valide ne pourrait pas le dire.

Pour moi, le handicap est une erreur de la nature. L’homme n’est pas fait pour être handicapé. Alors, il y a trois attitudes : refuser de voir mon handicap, pleurer et déprimer ou, au contraire, reconnaître que je porte un handicap. J’ai choisi cette dernière. Et je l’assume, même si elle est dure et trop lourde. Mais l’attitude de l’inclusion demande de passer d’un esprit cartésien à un esprit systémique. Les Anglo-Saxons ont une pensée plus circulaire que les Latins. Le handicap est beaucoup mieux intégré au Canada, aux États-Unis et dans les pays nordiques. Ces peuples considèrent que l’erreur fait partie du système et l’enrichit. Cet élément supplémentaire augmente la somme des parties. Je dirais qu’un et un ne font pas deux mais trois ! »

Par Catherine Yverneau

(1) www.jean-baptiste-hibon.com

Propos recueillis lors d’une conférence organisée par l’Association de parents d’élèves de l’enseignement libre de l’établissement scolaire Saint-Joseph de Reims.