Lorsque Benoît Aubrion évoque l’arrêt de l’aventure à la sixième étape du rallye-raid, qui en compte dix, l’émotion est palpable… « J’ai été très déçu, pour moi, mais surtout pour tous les gens qui m’ont soutenu. Alors, je dis que je suis allé au Dakar. Pas que j’ai fait “Le” Dakar ». En cause : une panne mécanique qu’il n’a pas pu résoudre seul. Et puis la fatigue était là, pesante. « Le vendredi précédent, j’avais roulé 18 heures. J’étais tombé au fond d’une dune, avec le nez amoché. Je souffrais d’une tendinite à l’avant-bras, soulagée seulement par des antidouleurs. » Pour l’agriculteur de 43 ans, cette fin prématurée est d’autant plus rageante qu’elle s’est jouée à une demi-heure : « Je suis arrivé avec rien que vingt-huit minutes de retard au dernier point de contrôle. Les organisateurs ont été intraitables. »

Une aventure exceptionnelle

Le céréalier, qui cultive 90 ha, est rentré chaos de son expédition : « J’ai dormi quasiment les quinze jours qui ont suivi ! Les conditions sur place n’aident pas à la récupération. Nous logeons dans un garage géant, où des camions vont et viennent toute la nuit, sans oublier le bruit des groupes électrogènes… Les deux premières nuits, je me suis assoupi une heure ! Les vedettes comme Peterhansel, Loeb, elles, sont hébergées à l’hôtel ou dans d’énormes mobil-homes. Mais le plus difficile, ce sont les distances à parcourir pour relier les “spéciales” : 200 km à l’aube, et 200 km le soir après la spéciale du jour. » L’homme constate que la solidarité entre concurrents n’a pas vraiment cours. « C’est plutôt du chacun pour soi », regrette-t-il. Sachant que les pilotes d’écurie bénéficient, eux, de toute l’assistance nécessaire.

Cette célèbre course, Benoît en a rêvé, tout gamin, en regardant les retransmissions à la télévision. Cet ancien rugbyman, au physique solide, n’a pourtant passé son permis moto qu’en 2016. Puis, il s’est acheté une « enduro » la même année. En 2017, il participe à un rallye qualificatif pour le Dakar. Mais c’est l’enfer ! Organisme et machine souffrent dans la chaleur accablante, et le sable.

Au retour, il décide d’opter pour le quad, plus stable. En 2018, nouvel essai, qu’il transforme : il obtient son sésame pour l’édition 2019. Aujourd’hui, malgré la dureté de l’épreuve et l’aspect financier, Benoît espère repartir pour le Dakar 2020. Afin d’être mieux entraîné physiquement, il s’est mis au triathlon. « Lorsque je fais quelque chose, je le fais à fond ! »

Dominique Péronne