Le Ceta, l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, est entré en vigueur en Italie le 21 septembre 2017. Nicola Bertinelli, président du consortium du parmesan, Parmigiano Reggiano, se félicitait alors des opportunités que cet accord offrait à l’Italie, en doublant notamment les contingents de fromages italiens exportables vers le Canada en franchise de droits de douane. En toute logique, les exportations auraient pu doubler. Deux ans après, il explique que « c’est plus compliqué ».

Chute des exportations de 32 %

C’est le moins qu’on puisse dire : si durant les premiers mois, les exportations ont progressé de 18 %, elles ont ensuite chuté de 32 % entre janvier et juin 2019. Probablement parce que les importateurs, voulant profiter du quota annuel de 30 000 tonnes (14 000 avant le Ceta), « ont commencé dès la mise en place de l’accord par acheter et stocker des fromages onéreux, comme le Parmigiano Reggiano et le Grana Padano, plus que le marché n’en demandait, interprète-t-il. Ils ont ensuite préféré se procurer des fromages moins prestigieux. » Le surplus de ces deux fromages transalpins emblématiques a même causé une chute des cours au Canada, les rendant inférieurs aux cours italiens.

Si le Ceta est censé reconnaître et protéger 143 AOP européennes, dont une quarantaine d’origine française et autant d’origine italienne, les syndicats agricoles lui reprochent d’avoir entériné l’existence sur le marché canadien des dénominations concurrentielles. En effet, l’accord autorise les indications géographiques traduites, comme « parmesan » ou « style Grana Padano », quand elles sont accompagnées d’un astérisque précisant l’indication lisible et visible de l’origine géographique du produit. De même, si un opérateur utilisait une indication homonyme avant 2013, son fromage peut la conserver, tout comme les marques déposées contenant une dénomination européenne.

Parmesan : le plus copié

Victime du succès de ses AOP, l’agroalimentaire italien est le plus copié au monde. Au premier semestre 2019, le Canada battait un record en produisant 6 300 tonnes de faux Parmigiano Reggiano, soit 13 % de plus par rapport à l’année précédente. Autrement dit, il se vend au Canada huit parmesans contrefaits pour deux Parmigiano Reggiano.

Finalement, le Ceta constitue une opportunité toute relative pour les AOP fromagères italiennes, mais un marché plus accessible pour le blé canadien (lire l’encadré ci-dessous).

Gaia Campghilhem