En 2009, vous étiez l’un des instigateurs de la grève du lait. Comment cette manifestation a-t-elle vu le jour ?

E.S : Le prix du lait chutait tous les jours, jusqu’à 20 centimes du litre. Dès 2008, on a commencé à bloquer les laiteries, les magasins. Puis il a été décidé de faire une grève européenne. On s’était fixé comme objectif de collecter la production journalière de la Wallonie : trois millions de litres de lait.

Et cette journée du 16 septembre 2009 a fortement marqué les esprits…

Le jour même, on ne savait pas si on allait réussir… Quand je suis arrivé sur le champ et que j’ai vu tous ces tonneaux qui affluaient, j’ai été surpris par cette mobilisation. Quand on a épandu le lait, j’ai vu des dizaines de producteurs pleurer, choqués. Ces images tournées à Ciney ont fait le tour du monde. On a même fait la couverture du New York Times !

Quelles ont été les conséquences de ce mouvement ?

Le prix du lait a augmenté le mois suivant. Il est remonté de 30 centimes en deux-trois mois. Ce mouvement mondial a eu un réel impact.

Pourtant la situation reste critique pour les producteurs laitiers...

Il y a encore eu une crise en 2015. Aujourd’hui, notre plan est de mettre en place une réduction de la production. En 2009, on était naïf, on pensait pouvoir changer le système. On veut garder une agriculture familiale et vivre de notre métier. On arrive à payer nos fournisseurs et nos factures, mais on ne paye pas notre main-d’œuvre. On est prêt à travailler sans salaire, sans mettre de l’argent de côté : ce n’est pas normal !

Pourquoi avoir organisé un rassemblement dix ans plus tard ?

Il est temps de revenir aux actions. La solution se trouve à Bruxelles, pas en Belgique. Avec la désignation d’un nouveau commissaire européen à l’Agriculture, c’est important de se remobiliser maintenant.

Propos recueillis par E. Huet