Les peurs du consommateur
Nous n’avons jamais eu autant de défiance du mangeur par rapport à son alimentation qu’aujourd’hui. Le lien avec la nourriture est intimement lié aux peurs véhiculées autour d’elle. Vache folle, grippe aviaire… Les crises sanitaires, la fraude à la viande de cheval et, actuellement, le « food bashing » (reportages à charge de type Cash investigation) ont largement entamé la confiance des consommateurs. On joue avec ces peurs et ça marche, comme dans le cas du saumon d’élevage. Et pourtant, dans le même temps, le consommateur continue de faire confiance aux agriculteurs, avec une cote qui est montée de 4 points entre 2013 et 2016 notamment chez les jeunes (18-34 ans).
Des différences culturelles
Dans la cartographie des peurs, les premières inquiétudes dans les pays du nord de l’Europe sont le bien-être animal et la protection de l’environnement. En France, Espagne, Italie, on craint tout ce qui est chimique, les OGM… Des différences qui s’expliquent par notre culture. Dans la culture catholique, on considère que l’homme protège une nature idéale. C’est pourquoi on ne veut rien y changer. Chez les protestants, l’homme fait partie de la nature et accepte de l’utiliser en la protégeant.
Besoin de réassurance
Ces peurs se traduisent par un besoin de réassurance. Depuis 2009, le consommateur dépense davantage d’argent pour son alimentation (18,8 % du budget). Il arbitre en sa faveur : 10 % des Français se disent prêts à payer plus cher pour se nourrir. On voit apparaître des microphénomènes de type « sans gluten », « sans lactose », « fait maison ». Ils touchent principalement les jeunes femmes qui amènent un repas fait par leurs soins sur leur lieu de travail. Nous observons une augmentation de la vente directe (12 % des Français disent acheter à un agriculteur). Le bio explose. Le lien social rassure. Le volet juste rémunération fonctionne aussi, avec des exemples comme « C’est qui le patron ? ».
Fabriqué en France
Le produit local rassure. C’est la première fois depuis trente ans que la cote du « fabriqué en France » est aussi élevée dans nos enquêtes. L’obligation de l’affichage de l’origine sur les produits à base de viande et les produits laitiers y contribue. Les plus jeunes pensent à leur santé lorsqu’ils mangent, et un peu moins au plaisir d’être ensemble, contrairement aux générations précédentes.
e-commerce
Le consommateur est avant tout connecté. La façon d’acheter change. L’e-commerce ne fait que croître : drive, mais également sites de producteurs, plates-formes. Il faut être présent sur les réseaux sociaux. Il faut jouer la transparence en montrant ce qui est fait sur les exploitations, comme le fait l’association Agriculteurs de Bretagne avec sa journée « Tous à la ferme », organisée chaque année.
(1) Pascale Hébel intervenait lors de l’assemblée générale de l’association Agriculteurs de Bretagne, le 21 mars à Saint-Brieuc.