«Le temps a laissé son manteau. De vent, de froidure et de pluie. Et s’est vêtu de broderies. De soleil luisant, clair et beau. » En dépit des horreurs de l’interminable guerre de Cent Ans, Charles d’Orléans, prisonnier des Anglais et « tout rouillé par le nonchaloir », saluait ainsi le même renouveau printanier que celui que nous vivons aujourd’hui.
Bel exemple à méditer ! Car si, en toute saison, le mouvement précipité des villes peut engendrer dans les débats de pénibles affrontements, la résurgence de la vie animale et végétale à la campagne nous porte à plus de sérénité. S’y impose d’ailleurs de plus en plus le jardin fleuri. Les coloris des plantes, les bruissements d’insectes, les cris amoureux des oiseaux, les eaux lumineuses des ruisseaux font une symphonie visuelle et auditive. Quelque peu délaissé après la guerre, le potager lui aussi refait surface en annexe des exploitations agricoles.
Déjà, lorsque La France agricole organisait des concours de cuisine régionale, il s’avérait que les gagnants se distinguaient fréquemment par la beauté de leurs jardins tant il est vrai que l’art de vivre par la cuisine et les fleurs forme un tout qui préserve des faux pas. Depuis l’Antiquité, l’amour des jardins s’est imposé dans l’histoire ; les peintres en ont dessiné avec bonheur les variantes et, aujourd’hui, ces jardins ont acquis leur place dans notre conception du patrimoine. Ils aident à vivre à tous les âges et (ne souriez pas !) lorsque j’eus six ans, je rêvai d’avoir la même « Pat Ped » (1) que mes camarades citadins. Je ne l’eus pas mais je m’en consolai en invitant mes amis de la ville à jouer à cache-cache avec moi parce que j’avais des buissons qu’ils n’avaient pas. Ainsi la nature peut-elle valoir mieux parfois qu’une acquisition !
(1) Pat Ped : patinette à pédale.