Matraquage médiatique

Il est très facile de manipuler les consommateurs et de leur faire peur. Rien qu’à la télévision, il y a une émission anxiogène sur l’alimentation tous les trois jours, soit 80 par an, avec une présentation frauduleuse de la réalité. Des pseudo-études scientifiques nous font croire que les produits issus de l’agriculture conventionnelle sont toxiques ! Et elles se gardent bien de parler de la dose journalière admissible, c’est-à-dire celle sans aucun effet nuisible sur la santé. On fait croire aux gens que, même en quantité infime, tout résidu de traitement phytosanitaire est dangereux. Ce qui n’est pas vrai, bien entendu.

Avec un tel matraquage, il n’est pas étonnant que le consommateur soit affolé. Pourtant, jamais notre alimentation n’a été aussi sécurisée et tracée. En France, la disponibilité et la diversité de bons produits sont très fortes. Il suffit de voyager à l’étranger pour s’en rendre compte. Arriver à faire croire aux gens le contraire est le fruit d’une stratégie marketing délibérée.

Intérêts commerciaux

Aujourd’hui, le seul mot « pesticide » suffit à angoisser les gens. À qui cela profite-t-il ? Bien évidemment à ceux qui vendent des produits sans pesticide, alors que tous les modèles agricoles en utilisent, bio compris… L’agriculture est le seul domaine économique où des filières communiquent sur l’idée que ce que les autres font est dangereux ou toxique. Je pense à la filière bio et aux marchés du « sans », comme le très à la mode « sans gluten », ou le « sans OGM », le « sans antibiotique », etc. Ces lobbys entretiennent les peurs des consommateurs dans des buts idéologiques et commerciaux.

Finalement, l’agriculture se voit imposer de nouvelles normes : interdiction des épandages aériens, moins de recherche sur les semences, freins aux fermes de 1 000 vaches ou veaux… Ces orientations font perdre à l’agriculture sa compétitivité et pourraient la pousser, à long terme, dans des impasses.

Ambiance insupportable

Propager l’idée que les produits agricoles sont de mauvaise qualité crée une ambiance insupportable pour les agriculteurs. Au final, le consommateur est plongé dans un monde de fantasme déconnecté de la réalité, avec comme credo que ce qui est naturel, petit et local serait forcément mieux. Or la proximité n’est pas un gage de qualité des produits. Voir un producteur sur le marché inspire peut-être confiance, mais contrairement aux idées généreusement répandues, en circuit court, la fraude est bien plus facile. Les garanties et la traçabilité est largement plus sécurisée sur les produits dans les circuits longs.

Dindons de la farce

Il faut que les consommateurs comprennent qu’ils sont victimes de cette « fabrique de la peur » organisée par certains lobbys. En réalité, ils sont les dindons de cette farce car ils achètent des produits toujours plus chers sur la base d’une anxiété qui n’a aucune justification. Les agriculteurs pourront ensuite se faire entendre sur leurs pratiques et leur travail. Plusieurs systèmes de production peuvent cohabiter, il faut arrêter de les opposer.

Propos recueillis par Sophie Bergot

(*) « Panique dans l’assiette, ils se nourrissent de nos peurs », de Gil Rivière-Wekstein, éditions Le Publieur, avril 2017, 210 pages, 19 €.