Ils viennent de toute la région pour fêter Noël à Keroudy. La ferme familiale des Milin, située à Milizac, dans le Finistère, ne fabrique pourtant pas de jouets. Et si les ateliers ne manquent pas sur place pour transformer le lait comme la viande, ça n’est pas non plus la ferme du Père Noël et de ses lutins… Mais ça y ressemble !

Ici, Gilbert, ses filles, Solenn et Énora, ainsi que son gendre, Damien, sont avant tout éleveurs laitiers. Ils fabriquent aussi du beurre, de la crème fraîche, de la tomme, du fromage à pâte molle, du fromage blanc, ainsi que des filets de bœuf, du rosbif, et même du rôti Orloff. La famille Milin ne chôme pas. Cependant, pour les filles, ça n’était pas assez. Il y a douze ans, elles ont convaincu leur père qu’un peu de lumière, un bonnet rouge sur la tête de la vache Bolka, « beaucoup de sourires » et de la musique à Noël ne feraient certes pas augmenter le prix du lait, mais pourraient aider à mieux faire connaître le métier. « Et puis, c’est magique ! Pas besoin de raison pour fêter Noël. J’avais 14 ans quand ça a commencé. C’est mon plus beau souvenir d’enfant », se rappelle Énora, qui ne cache pas que le vélo de ses dix ans l’avait remplie de joie. « Mais la crèche vivante, quand même… ! Quoi de plus merveilleux ? »

Partir en calèche avec Paulo

Depuis, Énora et Solenn poussent chaque année la féerie plus loin : un petit train confectionné à partir de bidons pour les enfants, des poneys, la calèche de Paulo, tirée par des chevaux de trait, une crèche vivante avec un âne, des moutons et la vache Eolka qui, en 2015, a pris la succession de sa mère Bolka… « Une dizaine de producteurs du réseau Bienvenue à la ferme exposent à nos côtés; nous sommes aidés par une quinzaine de bénévoles, de la famille, des amis, les salariés de la ferme, et d’autres jeunes agriculteurs. J’oublie l’équipe des crêpes - indispensable ! - ainsi que des artisans du coin venus présenter leur savoir-faire. » Keroudy prend des allures de village le temps d’une journée, et accueille plus de 2 000 personnes : « C’est mythique ! C’est génial ! C’est l’image de Noël comme chacun l’a en tête. Les gens prennent des photos dans tous les sens. Nous mangeons, échangeons. J’aime cette ambiance. »

En coulisses, l’équipe travaille sans relâche afin de recevoir les visiteurs, puis répondre à toutes les commandes. « Pas si vite ! », nous dit souvent notre père. Chaque année, c’est pareil. Il nous répète : « Comment allons-nous y arriver ? » Mais Énora et Solenn ont l’énergie vissée au corps. Comme le Père Noël, Jean-Paul, un client de la ferme, venu évidemment de Laponie.

En cette fin d’année, les deux sœurs pensent déjà à 2019, et pas seulement aux futures festivités. La cadette a un grand défi à relever : après quatre ans de salariat sur la ferme, et douze ans passés à rêver de devenir agricultrice, elle prendra la succession de son père qui part à la retraite. L’installation, aux côtés de son aînée et son beau-frère, est prévue en avril 2019.

Rosanne Aries