«Dans notre petite ville de Lons-le-Saunier (Jura, 20 000 habitants), les produits bio, locaux et sous signe de qualité représentent 45 % de l’approvisionnement de notre cuisine centrale, et 3 millions d’euros d’achats alimentaires annuels.
La cuisine centrale de notre cité et ses 61 salariés (2) préparent ainsi chaque jour 5 000 à 7 000 repas pour les écoles primaires, l’hôpital, les maisons de retraite et les repas à domicile. 99 % de la viande de bœuf est achetée à 47 éleveurs bio (200 bêtes par an). Le pain est fabriqué à partir de céréales locales par un meunier proche et un boulanger de Lons (270 000 baguettes en 2018). 200 000 yaourts et 20 000 litres de lait sont achetés chaque année. Pour développer l’utilisation de légumes bio, 1 million d’euros HT a été investi dans une légumerie. Dix maraîchers se sont structurés en association.
Adapter recettes et menus
De notre parcours, nous avons tiré quelques enseignements que nous partageons volontiers avec les nombreux visiteurs qui viennent nous voir.
Pour développer un partenariat durable et équitable avec les agriculteurs, il faut partir de leurs disponibilités en termes de produits, en adaptant nos recettes et nos menus, et non pas faire l’inverse. Pour valoriser les avants de bovins, nous avons travaillé sur la cuisson à basse température. À l’époque, elle n’était pas encore très pratiquée. Offrir aux producteurs une sécurité d’écoulement et un prix rémunérateur juste est essentiel. On leur demande quel est le prix nécessaire pour qu’ils gagnent décemment leur vie. Les surcoûts liés au prix d’achat des produits sont compensés par un travail sur le gaspillage et la gestion des déchets.
Pour se garantir un approvisionnement local, savoir innover dans la rédaction des appels d’offres est parfois nécessaire. En 2011, alors que la notion de « proximité » n’existait pas encore, nous avons exigé « des bovins achetés sur pied, avec abattage dans la commune ».
Une méthode de fonctionnement rigoureuse est indispensable. Celle-ci est basée sur une planification annuelle des besoins avec des ajustements mensuels, ainsi que sur un règlement simple : une qualité, avec des sanctions en cas de non-respect des engagements.
Être maître de ses moyens, avoir ses propres outils aident à développer une telle économie circulaire. À Lons, la gestion de l’eau potable se fait dans le cadre d’une régie directe. La ville a conservé son abattoir municipal et sa cuisine centrale.
Confiance entre tous les maillons
Les problèmes sont humains. Il faut rassembler. L’entente et la confiance entre élus, chef de cuisine et personnels, et agriculteurs est essentielle. Une telle démarche n’est pas réalisable sans partenaires. Elle doit s’inscrire dans la durée et reposer sur une relation de confiance. Les engagements pris doivent être tenus.
En 2018, le coût de revient d’un repas s’est établi à 4,21 € HT, dont 2,12 € de produits alimentaires. Notre démarche est rentable pour tout le monde. On ne comprend pas pourquoi ce qui est réalisé ici ne se répand pas comme une traînée de poudre. »
Propos recueillis par Anne Bréhier
(1) Jacques Pélissard. (2) Équivalents temps plein.