On a le droit de choisir son mode de vie, son orientation sexuelle, son alimentation, son orientation politique. Dès lors qu’on respecte le choix des autres ; ça s’appelle juste savoir vivre ensemble et respecter l’autre.
Je travaille dans le sport de haut niveau depuis trente ans. Je respecte totalement le choix des sportifs : végan, végétarien, végétalien, sans gluten, ramadan. Et nutritionnellement, je pense savoir les accompagner, sans émettre de jugement. Je suis médecin, je m’inscris dans le respect et l’écoute. Je leur explique juste que ne pas avoir d’apports d’origine animale expose à des carences : calcium, vitamines du groupe B, certains minéraux et oligoéléments, fer. Ma mission est de prendre en charge ces carences.
Il peut alors s’ensuivre un retentissement sur la performance, mais aussi sur la santé. Je dispose d’un logiciel de nutrition très abouti. Il peut analyser précisément les apports en macronutriments et en micronutriments d’un sportif qui relève ses apports quotidiens pendant une semaine par exemple. Clairement, le végan présente des carences. Oui, ces carences peuvent être compensées par des compléments de deux ordres : par exemple manger des protéines végétales, dont entre autres des légumes secs et du soja, et aussi des compléments alimentaires.
Soucieux de l’équilibre psychologique du sportif, je me pose aussi la question du « plaisir » de l’alimentation chez un végan : quid du retentissement psychologique si l’assiette perd du goût, des couleurs, des saveurs ?
En tant que médecin, je préférerais que l’on s’attache bien plus à considérer les dégâts sur la santé du tabac, de l’alcool (notamment chez les jeunes). Que l’on porte aussi un peu plus de considération au droit de l’humain à mourir dignement, sans souffrir, à l’exclusion dont sont victimes de nombreuses minorités. J’adore les animaux, je suis plus qu’un autre conscient de la souffrance animale et donc de tout ce qui doit être mis en place pour respecter l’animal, pendant sa vie, et à l’abattoir. Mais on a le droit aussi de s’émouvoir de la souffrance des enfants ou des femmes battus, des « vieux » dans les maisons de retraite.
Au quotidien, je côtoie de jeunes agriculteurs, passionnés par leurs études ou leur job. Je suis émerveillé par leur investissement. Ils aiment leur boulot et sont motivés pour faire évoluer le confort animal. Ils permettent la transmission d’une culture ancrée dans les territoires, qui représente une belle spécificité dans notre pays. Peut-on envisager des territoires ruraux où nos enfants ne verront plus ni vaches ni moutons ni poules ?
Avec le recul, je m’attriste de cette évolution sociétale. Je me bats pour conseiller une alimentation variée, diversifiée. Bien sûr, il ne faut pas manger trop de viande. Mais en consommer une bonne (traçabilité, confort animal, éthique de l’euthanasie), deux ou trois fois par semaine, fait partie d’une alimentation équilibrée.
Sur le terrain du sport, je constate que la grande majorité des sportifs consomme de la viande : par exemple, les menus du Tour de France, dans toutes les équipes, en incluent deux jours sur trois, et du poisson un jour sur trois. Cela s’inscrit dans l’équilibre nutritionnel et psychologique du sportif. Un mouvement se dessine : le « welfarisme » (Welfarm, CIWF, et d’autres mouvements). Il regroupe des militants qui veulent améliorer les conditions de vie et d’abattage des animaux, mais sans réclamer la fin de l’élevage. Moi, ça me semble pas mal…