«Vous avez du chêne ou du douglas ? – Pas beaucoup. Sur mes espaces abandonnés par l’agriculture, j’ai planté du frêne, du peuplier et du merisier. – Malheureux ! Le frêne est malade, le peuplier, on n’en veut plus, et le merisier s’est effondré depuis qu’on dédaigne les meubles de qualité ! Heureusement encore que vous n’avez pas planté des ormes ; ils sont tous morts. » Conversation peu engageante à l’issue de mes tentatives sylvicoles… D’autant que ceux qui avant moi ont planté de beaux hêtres, arbres du pays par excellence, s’entendraient dire aujourd’hui : « Avec le changement climatique, le hêtre, c’est fichu ! »
Et pourtant, comme la terre de labour, l’hectare de forêt prend sensiblement de la valeur. À l’Académie d’agriculture une séance sur « le bois dans la construction » tente d’expliquer ce soudain tonus de la filière. Sur le marché international où 70 % de la population pourrait être urbanisée en 2050, le parquet, le lamellé-collé, la charpente individuelle, la construction en grande hauteur favorable à la légèreté du bois ont le vent en poupe. Actuellement presque égale à la production automobile, la filière française du bois pourrait doubler pour approcher de celles d’autres pays européens. Reste que les scieries, généralement des PME, sont à court de financement pour développer la transformation.
L’espoir réside, au niveau national, dans la constatation que le bois est une importante source de stockage de carbone préconisée par la Cop 21. Mais demeurent des obstacles à vaincre : le risque économique d’un retour sur investissement presque aussi long qu’une vie humaine, les maladies impliquant des recherches approfondies, l’évolution de la concurrence de pays plus étendus que la France, et les mentalités qui érigent l’arbre en patrimoine inamovible alors qu’il naît, vit et meurt comme chacun de nous.