Tout remonte au mois de mars 2017, lorsque 33 entreprises brésiliennes sont prises la main dans le sac par la police, qui révèle un vaste système de corruption permettant de certifier de la viande avariée afin de la mettre sur le marché. Pas moins de 20 abattoirs sont éclaboussés par le scandale. Parmi eux, douze appartiennent à BRF (Brasil Foods), l’un des plus gros producteurs de viande au monde. Dans la foulée, la Chine, le Chili, la Russie et l’UE imposent des restrictions, mettant en péril un pilier du secteur agricole brésilien.

Bras de fer avec l’UE

Des principaux partenaires commerciaux du Brésil dans ce secteur, c’est l’UE qui est la plus sévère en interdisant l’importation des abattoirs de BRF et d’autres. Le 19 avril dernier, les États membres ont en effet voté à l’unanimité l’interdiction d’importation de 20 établissements supplémentaires, exportateurs de volailles principalement. Une décision qui sonne comme une réponse du berger à la bergère, alors que deux jours auparavant, le ministre de l’Agriculture, Blairo Maggi, avait menacé d’attaquer l’UE auprès de l’OMC.

Parlant d’une « guerre commerciale », il n’avait pas hésité à accuser l’UE lors d’une conférence de presse à Brasilia : « Ils en profitent pour nous sortir du marché en avançant des arguments sanitaires, qui ne sont pas justes. » Il vient à nouveau de s’exprimer sur la question (lire notre interview p. 23). Pour les volailles, les restrictions européennes portent un coup dur aux exportations du Brésil. En avril 2018, elles ont chuté à 255,05 mille tonnes, soit 28,1 % en volume par rapport au mois précédent, rapporte le Centre d’études avancées en économie appliquée (Cepea – Esalq/USP). Son niveau le plus faible depuis 2005. Une chute que l’organisme attribue essentiellement au blocage de l’UE.

Nouveaux marchés

Pendant ce temps-là, le Brésil se rattrape sur les exportations de viande bovine, en dépit de l’embargo russe qui ne devrait pas tarder à être levé, et cherche à s’ouvrir des marchés. La Chine a ainsi représenté près de 50 % des exportations pour le premier trimestre 2018, gagnant une participation de 10 points par rapport à la même période 2017. Selon l’Abrafrigo (Associação Brasileira de Frigoríficos), entre janvier et mars, les exportations de viandes bovines vers la Chine ont atteint 393 083 t pour une valeur de 1,589 Mds de dollars. Une croissance interannuelle de 19 % en volume et de 21 % en valeur de facturation.

Vers le Mexique aussi, les exportations de viandes de poulet ont augmenté de près de 60 % par rapport à 2016, entamant un peu le leadership des États-Unis. Le géant sud-américain a également regagné sa première place des importateurs chiliens, au grand dam du voisin paraguayen. Ce dernier craint que l’intensité des restrictions européennes ne le transforme en plaque tournante du trafic de viande avariée brésilienne.