Nouveau discrédit pour les éleveurs néerlandais avec les révélations d’une fraude au lisier généralisée. L’enquête récente d’un quotidien national a mis en lumière une situation aux allures de scandale : les deux tiers de la filière d’élevage (exploitants, entreprises de traitement du lisier, transporteurs, laboratoires) ont été « en cheville » pour organiser ces fraudes à grande échelle. Sur les 80 millions de tonnes de lisier produites chaque année aux Pays-Bas, une part de 25 % à 40 % ferait l’objet de pratiques sujettes à caution.

Porcs et poulets

Le gros des fraudes s’est produit dans les régions du sud du pays, où sont concentrés les exploitations porcines et les élevages de poulets. En toile de fond, les tensions sur le marché de l’épandage du lisier de porcs qui sévissent depuis plusieurs années aux Pays-Bas. Les disponibilités d’épandage ont en effet diminué pour les producteurs de porcs, en raison du développement des exploitations du secteur laitier. Et, dans le même temps, la réglementation sur l’épandage des phosphates s’est durcie. Du coup, les prix pour se débarrasser de lisier excédentaire ont atteint des sommets. Entre 2015 et 2016, les producteurs ont été confrontés à une augmentation de 4 €/m3 pour le dégagement de leur surplus de lisier (entre 21 et 25 €/m3 pour le lisier de porcs, entre 18 et 25 €/m3 pour le lisier de bovins). À l’inverse, les agriculteurs acceptant du lisier excédentaire se frottent les mains. Selon l’importance des frais de transport, le prix pour placer du lisier de porc a bondi de 37 % à 87 % entre 2015 et 2016 et entre 25 % et 50 % pour les déchets bovins. En conséquence, les exploitants ont tendance à tarder pour passer leurs commandes dans l’expectative d’une nouvelle hausse.

Laxisme

Dans ces conditions, les fraudes sont devenues monnaie courante au fil du temps. Sans surprise, elles donnent souvent lieu à un épandage nocif inconsidéré des sols avec une partie de l’excès de lisier soustraite à la réglementation.

La situation a aussi profité du laxisme des autorités sanitaires dont les contrôles s’avèrent très sporadiques. Sur le terrain, une des magouilles a porté sur l’organisation de fausses collectes de lisier dans les exploitations ou de stockages « bidons » avec la complicité de transporteurs. Une autre supercherie consistait pour l’exploitant à déclarer une superficie de terres supérieure à la réalité, ce qui l’autorisait à produire davantage de lisier. En aval, des cabinets comptables et des laboratoires parties prenantes à ces tromperies, les « couvraient » en falsifiant les documents administratifs et les prélèvements destinés aux autorités sanitaires. Devant l’ampleur de ces pratiques, le ministère de l’Agriculture entend mettre en place au plus vite un plan de lutte contre cette fraude généralisée. Les organisations professionnelles sont priées de présenter leurs propositions mi-décembre.