Rassemblement évangélique ou éleveurs allaitants ? L’avenir de la ferme de Toutvent devrait bientôt être tranché. Cette exploitation, située dans la Brenne entre Bélâbre, Ruffec et Le Blanc, dans l’Indre, est en vente depuis quatre ans. Quatre ans que son propriétaire danois, Jens Dinesen, tente de vendre les 260 ha de terres à faible potentiel, non irrigables, avec des étangs et des bâtiments. Quatre ans sans aucune offre. Face au manque de candidats, la Safer a mis en place des baux précaires pour que sept éleveurs puissent cultiver du foin.

Depuis deux semaines, la ferme de Toutvent attire de nombreuses convoitises. Fin mars, la chambre d’agriculture a appris par hasard qu’elle pourrait être vendue à la mission évangélique des tziganes de France, Vie et lumière, qui recherche un site pour accueillir 6 000 caravanes et 30 000 pèlerins, l’été. La Safer, qui pourrait instruire le dossier, ne peut pas s’opposer au projet qui est d’ordre privé. Elle ne pourrait le préempter que sur demande. « Nous agissons sur instructions de l’état, en privilégiant le meilleur dossier pour l’aménagement parcellaire et les surfaces agricoles », explique Céline Braconnier, directrice de la Safer du Centre.

Dans la campagne, c’est l’émoi. Les élus locaux et la profession agricole se mobilisent pour empêcher la vente. « Ma réticence ne vient pas de la personnalité de l’acheteur, mais du fait que ce ne soit pas un projet agricole », souligne Robert Chaze, président de la chambre d’agriculture et voisin de l’exploitation en vente. Pour Nicolas Calame, porte-parole de la Confédération paysanne de l’Indre, syndicat inactif dans ce dossier, « il n’y a pas d’enjeu agricole. C’est la peur des autres qui fait bouger les choses ».

Former un consortium

Le vendeur serait favorable à un projet alternatif, mais il met deux conditions : que l’offre porte sur la totalité de la propriété et qu’elle soit au même prix que celle de Vie et lumière, soit 1,7 M€ HT, soit 6 500 €/ha (bâti et étangs compris). Il a accordé un délai supplémentaire jusqu’au 26 avril au projet de territoire. En quelques jours, les services de la chambre d’agriculture trouvent neuf propriétaires ou agriculteurs et forment un consortium. « Même si certains jugent le prix trop élevé, ils achètent pour empêcher le rassemblement près de chez eux », indique Robert Chaze, qui pourrait mettre la main au portefeuille s’il manque quelques hectares, « pour les louer aux jeunes ». Dans le consortium, on retrouve quelques-uns des éleveurs locataires et deux fils et filles d’agriculteurs qui devraient s’installer. Aude Richard