Saison des pluies, saison sèche : voilà le régime très marqué et pas vraiment tempéré auquel est soumise la France depuis trois ans. Comment ne pas y voir un lien avec le changement climatique ?

Cet hiver se révèle en tout cas historique, avec deux fois plus de pluies que la normale et il surpasse le précédent qui avait déjà frappé les esprits. Les inondations sont impressionnantes à de nombreux endroits, dans le bassin de la Garonne, de la Charente, de la Seine, etc. (lire page 20).

Certes, les hommes semblent a priori bien démunis face à une telle force de la nature, mais la répétition de ces phénomènes extrêmes devrait quand même engendrer certains questionnements et remises en cause politiques. Sur le front des indemnisations par exemple : concernant les cultures noyées, il n’y aura pas grand-chose à espérer, une minorité d’agriculteurs étant assurée en multirisques climatiques. On attend toujours que le chantier de rénovation de la gestion­ des risques, entamé depuis des lustres, décante…

De nombreuses parcelles ayant été surinondées pour protéger en aval des villes (comme Paris) ou ayant joué naturellement un rôle de zone d’expansion des crues, il est anormal et regrettable qu’il y ait si peu d’agriculteurs en droit d’espérer une indemnisation au titre du service rendu à la collectivité. Elles sont pourtant prévues dans les Papi 3, ces « plans d’action et de prévention des inondations » à construire à l’échelle locale, mais combien sont opérationnels à ce jour ?

Comment d’une manière générale ne pas dénoncer à ce stade les mesures prises en dépit du bon sens en matière d’entretien des cours d’eau, de curage des fossés et qui sont ici des facteurs aggravants ? L’écologie dogmatique a sa part de responsabilité dans ce qui se passe.

Pour finir, nombre d’agriculteurs enragent - à juste titre - de voir filer ces milliards de mètres cubes qui, stockés pour une très modeste part, leur seraient fort utiles l’été dans un tel contexte de modifications climatiques. Faut-il, dès lors, croire le ministre de l’Agriculture lorsqu’il déclare au Sénat que la question de l’eau, c’est « la mère des batailles » et qu’il n’a pas l’intention, contrairement à ce qui s’est fait depuis des années, « de mettre le sujet sous le tapis » ? « Il faut prendre le problème à la racine, a-t-il surenchéri, il faut développer les retenues d’eau. » Et, selon lui, le plan de relance est aussi là pour ça.

« Banco ! », a-t-on envie de répondre, mais d’autres avant lui se sont avancés, perdant à chaque fois leurs arbitrages face au ministère de l’Écologie et au lobbying des associations. Le temps n’est plus aux rapports ou aux énièmes missions d’inspection sur la question mais à l’action. C’est là-dessus que sera jugé Julien Denormandie, au nombre de projets de retenues actuellement en carafe et qui seront relancés. Il y a quelques jours, 21 réserves de substitution du bassin de la Boutonne viennent d’être bloquées par le tribunal administratif, dix ans que ça dure…