Face aux 700 jeunes agriculteurs reçus sous les ors de l’Élysée (lire p. 20), Emmanuel Macron a tenu un discours offensif leur annonçant pour l’avenir une « révolution culturelle ». Pourtant, avec les adaptations régulières demandées aux paysans, l’agriculture est déjà engagée dans une révolution permanente. Et si le chef de l’État évoque la nécessité de passer « de l’exploitant agricole à l’entrepreneur agricole », c’est fait depuis longtemps.

La vraie révolution serait que le président de la République réussisse son pari de voir les agriculteurs rémunérés par des prix justes basés sur les coûts de production. Mais si l’on regarde le climat très tendu des négociations commerciales achevées cette semaine, on peut être inquiet, car une charte de bonne conduite avait été signée. Le chef de l’État, qui n’est « pas là pour plaire » mais « pour faire », devra donc aller au bout de la logique et faire en sorte que les textes présentés au printemps ne transigent en rien face aux distributeurs et aux industriels.

Si Emmanuel Macron a pris rapidement en main le dossier agricole, ses prédécesseurs avaient eux aussi fait de grandes promesses. Il faudra donc juger sur pièces. Après le travail sur les plans de filière, le chef de l’État présentera en mai une stratégie globale qui permettra de décliner les demandes françaises pour la prochaine Pac, avec la gestion des risques au cœur de celle-ci. Les jeunes présents à l’Élysée ne demandent qu’une chose : que les résultats soient à la hauteur du discours. Mais le chef de l’État doit aussi lever la contradiction entre sa demande aux paysans de monter « en gamme » (bio, signes de qualité…) et le risque que représente l’arrivée de produits à bas prix des pays du Mercosur ne respectant pas nos standards environnementaux ou sanitaires, même s’il évoque des « lignes rouges ». L’agriculture européenne ne peut pas être bradée pour des voitures ou des services. Elle mérite mieux ; elle fait partie de notre patrimoine. C’est le président qui le dit !