Quand Armelle Poupart reprend, en 2012, l’exploitation familiale située à Allibaudières dans l’Aube, au milieu de la Champagne crayeuse, blé, orge, colza et betterave occupent les 115 ha. Cependant, la surface étant insuffisante, elle conserve à temps partiel son poste chez un agent d’assurances avec un portefeuille de clients en agriculture ; elle y travaillait à plein-temps depuis 2009.

« Les cours des céréales et du colza n’étant pas très rémunérateurs, j’ai aussi souhaité diversifier les cultures pour ne pas mettre tous mes œufs dans le même panier », raconte l’agricultrice. Luzerne, pomme de terre féculière et œillette font alors leur entrée dans l’assolement au printemps 2013. « La féculerie d’Haussimont, située à 25 km, recherchait de nouveaux producteurs. Tout comme Prodeva, une coopérative de déshydratation de luzerne installée à 30 km, et Francopia basée dans le Nord de la France pour l’œillette. J’ai saisi toutes ces opportunités. »

Armelle Poupart cherche aussi à dégager plus de valeur ajoutée, sans agrandir l’exploitation. Et ceci, au travers d’une production qui lui permettrait d’avoir un contact direct avec le consommateur, « pour rompre la solitude de l’agriculteur sur son exploitation, explique-t-elle. De plus, pendant mes études, j’ai pu m’intéresser à la culture de l’asperge lors d’un stage. Cette production me plaisait et il n’y en avait pas autour d’Allibaudières. J’ai donc décidé d’implanter un hectare avant de m’installer, car il faut attendre deux ans pour la première récolte. C’était un peu un pari car c’est un légume de luxe. »

Créer de la valeur ajoutée

La luzerne, la pomme de terre et l’œillette ne nécessitent pas d’investissement particulier. « L’œillette se sème avec un semoir à céréales. Comme la luzerne, elle est récoltée par l’usine. » Pour la pomme de terre de fécule, Armelle Poupart a créé une société avec son mari, exploitant dans la Marne et producteur de pomme de terre, qui détient le matériel nécessaire à la culture (planteuse, butteuse, arracheuse). « Je n’ai pas eu à investir car il y avait déjà du matériel sur l’exploitation de mon beau-père. »

Pour les asperges, culture qui reste en place pendant huit à dix ans, Armelle a investi dans les griffes d’asperges (sorte de gros rhizome) pour 8 000 €/ha à la plantation, dans une ligne de tri d’occasion (1 000 €) et dans l’aménagement du magasin de vente à la ferme (4 000 € dont 2 000 € pour la chambre froide) La ligne de tri et le magasin ont été installés dans les bâtiments qui servaient d’étable et de salle de traite à ses grands-parents. Hormis la fertilisation, l’itinéraire cultural (plantation, désherbage et récolte) se réalise à la main. « L’asperge pousse toute seule, mais elle demande beaucoup de main-d’œuvre ! » Au niveau de la ligne de tri, une personne est nécessaire pour les distinguer selon le calibre et la couleur, et ensuite réaliser des bottes de 1 kg.

L’agricultrice emploie 1,5 UTH d’avril à juin pour la récolte. « En moyenne, on récolte 3 t/ha. Mais cela dépend de la météo. À 26° C, l’asperge peut pousser de 5 cm/jour ! En 2016, je n’ai récolté que 2,3 t/ha car il a beaucoup plu et il faisait froid. Pour étaler la récolte sur deux mois, j’ai choisi plusieurs variétés. » Comme la production n’était pas suffisante pour satisfaire la demande, 50 ares supplémentaires ont été implantés en 2015 pour une première récolte ce printemps. Pour l’avenir, Armelle Poupart n’a pas pour objectif de développer la surface en asperge. « Avec 1,5 ha, je suis arrivée au maximum de ce que je peux gérer seule avec les saisonniers. Avec deux hectares, il faudrait embaucher quelqu’un au magasin, ce qui ne serait pas rentable, et démarcher les grossistes. On bascule alors dans une autre dimension. »

Armelle a un autre rêve, « un peu fou. » « J’aimerais bien produire des agneaux pour les transformer et les vendre en direct. Cela se fera peut-être un jour si je ne travaille plus à l’extérieur. Je veux également trouver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée », conclut la dynamique agricultrice, maman depuis un an, également administratrice à la coopérative Scara et membre du bureau des JA de l’Aube.