Jean-Luc Julian est installé avec son épouse sur 330 ha à Cadours, dans les coteaux de la Haute-Garonne. Sur son exploitation, les pentes s’élèvent jusqu’à 40 % et les terres sont très hétérogènes. Dans cette région, où l’année a été marquée par une très forte pluviométrie et de nombreux orages, le spectacle de la terre dévalant les pentes est courant. De nombreuses ravines ont fait leur apparition.
Dès son installation, en 1998, Jean-Luc a travaillé sur cette problématique de l’érosion. « Quand j’ai repris l’exploitation familiale, le système était très classique : blé, tournesol, avec labours réguliers, relate-t-il. Dans certaines parcelles, il y avait des zones d’affleurements calcaires où plus rien ne poussait. » Avec son père encore sur la ferme, Jean-Luc a mis du temps à faire évoluer ses pratiques. « Pendant dix ans, ça a été très difficile de modifier ce qui a toujours été pratiqué sur l’exploitation », confie-t-il.
Une couverture en interculture
En 2004, il arrête le labour et expérimente les couverts végétaux, grâce à l’accompagnement d’Agro d’Oc, l’union des Ceta d’Oc. Il teste de nombreux couverts d’interculture, et allonge ses rotations en introduisant du colza, du maïs et du pois. « Mis à part Agro d’Oc, on n’avait pas de soutien alors que l’on expérimentait des techniques réduisant l’érosion, regrette-t-il. Encore maintenant, je ne reçois aucune aide pour ce que je mets en place. Pire, mes aides Pac ont baissé de 30 % depuis la dernière réforme. »
Après tâtonnements, Jean-Luc a trouvé une succession de couverts adaptée à son exploitation. « Après la moisson du blé, je sème du sorgho fourrager à 15-20 kg/ha, indique-t-il. L’avantage de cette plante est qu’elle étouffe les adventices. » À l’automne, le sorgho est détruit chimiquement ou mécaniquement (lire l’encadré) et forme un paillage sur le sol. Juste après, Jean-Luc implante une féverole, qui fournira une bonne quantité de biomasse au printemps, avant le semis du tournesol ou du maïs.
Le vrai tournant est survenu en 2013, lorsqu’il a acheté un strip-till, une machine permettant de travailler le sol dans la ligne de semis et de laisser les résidus du couvert en surface de l’inter-rang. « À l’automne, je réalise un premier passage pour dégager la ligne de semis, à 15 cm de profondeur maximum, détaille-t-il. J’effectue une reprise au printemps pour réchauffer la ligne, et favoriser une meilleure levée de la culture suivante. » Son tracteur est équipé d’un autoguidage RTK. Le strip-till lui permet aussi de localiser l’engrais uniquement sur la ligne de semis.
Après cinq années de recul sur le système « strip-till + couverts » mis en place sur 75 ha de son exploitation, Jean-Luc observe de réels changements dans ses parcelles. « L’évolution du sol est impressionnante, souligne-t-il. Malgré toute l’eau qui est tombée cette année, la terre n’a quasiment pas bougé sur le strip-till. Les affleurements calcaires ne se voient plus, et la portance est meilleure. Au printemps, quand il est tombé 80 mm en une journée, j’ai pu rentrer dans ma parcelle 3 à 4 jours après. » Désormais, son but est de généraliser cette pratique à tous ses tournesols, maïs et colzas.
Jean-Luc teste également le couvert de trèfle ou de vesce entre deux blés. Au final, la réduction du travail du sol lui fait de gagner du temps. « Je suis moins dans mon tracteur, et plus souvent à observer mes parcelles, témoigne-t-il. Mes deux tracteurs travaillent moins de 500 heures par an ! »