Ce sport, encore méconnu en France, pourrait sortir de l’ombre après ces championnats du monde. Il englobe trois disciplines : la « tonte machine », la « tonte aux forces » (sorte de grands ciseaux) et le « tri de la laine ». Trois cents compétiteurs de trente-quatre nationalités vont s’affronter pour la première fois en France lors de la dix-huitième édition de ce rendez-vous, qui fête cette année ses quarante-deux ans. De nombreuses épreuves sont prévues du 4 au 7 juillet.

L’équipe de France, constituée de Lucie Grancher et Adèle Lemercier en « tri de la laine », Loïc Leygonie et Thimoléon Resneau en « tonte machine » et Loïc Jauberthie et Reinhard Poppe en « tonte aux forces », s’est entraînée en participant régulièrement aux rencontres internationales.

« Les six candidats ont concilié l’entraînement avec la tonte chez les clients »,souligne Alain Belliard, le coach des Français. Ils sont très motivés et défendront leurs chances avec assiduité, même si les pays de l’hémisphère Sud partent favoris.

En « tri de la laine », Lucie Grancher a déjà un palmarès bien étoffé. Depuis 2015, elle a régulièrement participé au Tournoi des six nations. En 2017, elle a gagné le concours international de Bellac (Haute-Vienne). Elle est même parvenue à se classer quatrième dans la catégorie senior au Gisborne show, en Nouvelle-Zélande.

Quelques jours avant le mondial, la jeune compétitrice s’est envolée pour le Royaume-Uni afin d’y concourir encore une fois. Là-bas, comme en Nouvelle-Zélande ou en Australie, les compétitions sont organisées plus régulièrement.

« Ces pays ont aussi une culture de valorisation de la laine beaucoup plus développée que la nôtre, déclare Lucie. Cette tradition a quasiment disparu chez nous. Pour des raisons de mise aux normes écologiques, les industries de transformation lainière ont petit à petit mis la clé sous la porte. C’est un vrai désastre pour les éleveurs français. Il est incohérent que la laine de nos mérinos, par exemple, parte en Chine pour parfois revenir sur le marché français sous forme de produits manufacturés. C’est un comble et un non-sens écologique. »

Un peu partout en France, des initiatives naissent toutefois pour mieux mettre en valeur les toisons (voir p. 58). « Lucie s’est beaucoup impliquée pour faire connaître l’intérêt du tri, en organisant des épreuves en France au cours des dernières années », souligne Alain Belliard.

La jeune femme a été sensibilisée depuis son plus jeune âge à la qualité des toisons, car son père Emmanuel avait importé des mérinos de Nouvelle-Zélande à la fin des années 2000. Dans les Alpes-de-Haute-Provence, il valorisait aussi bien la viande de ses animaux que la laine. en vente directe, il avait calculé qu’il tirait 5 €/kg de la fibre (voir La France agricole du 4 juillet 2008 et du 2 mai 2009).

Face à l’équipe de Nouvelle-Zélande, Lucie est décidée à ne rien lâcher. Elle a noué des relations amicales avec les compétitrices et sait d’ores et déjà qu’elles sont redoutables lors des épreuves.

Dans la catégorie « tonte aux forces », nos deux représentants, Loïc Jauberthie et Reinhard Poppe, se sont entraînés avec les meilleures équipes du monde. « À la fin du mois de mai, nous avons participé au Tournoi des six nations en Angleterre, où la France, le Pays de Galles, l’Écosse, l’Irlande du Nord et la République d’Irlande se sont affrontées, explique Reinhard, qui précise que le monde des tondeurs est un milieu d’échanges. Si les Européens vont souvent en Nouvelle-Zélande, l’inverse est vrai. D’autant que les effectifs de moutons ont fortement baissé dans l’hémisphère Sud, ce qui explique également l’exode de ces professionnels. »

C’est au cours de ses voyages en Angleterre que Reinhard a rencontré George Mudge, « un anglais âgé de 72 ans qui fait figure de référence pour cette épreuve. Avec lui, j’ai beaucoup appris concernant la technique de tonte avec les forces ». Parmi les concurrents au Mondial figure Allan Oldfield. Le représentant néo-zélandais est venu en France en 2018 pour participer à un stage organisé par Reinhart. Il sera un adversaire particulièrement sérieux.

« Depuis le mois de mars, nous avons dépensé énormément d’énergie. Je vais à présent doser mes efforts », déclare Reinhard. Ce dernier s’est en effet beaucoup investi. « J’ai utilisé les “forces” au maximum. À la fin de la journée, le revenu est divisé par trois. Quelques clients préfèrent la tonte avec cet outil. Il ne manque pas d’atout et il occasionne moins de stress pour les animaux. Dans le cas des agneaux, des études néo-zélandaises ont montré qu’il n’y avait pas de rupture de croissance. »