À quoi sert une comptabilité aujourd’hui ?
L’objectif premier de la comptabilité est d’établir la confiance avec les tiers :la banque, les salariés, les clients, la MSA, mais aussi l’État. Dans un second temps, elle est là pour concentrer les données qui permettront à l’agriculteur de gérer son entreprise, avant même d’être la source des déclarations fiscales et sociales. Mais est-ce qu’on a besoin dans le monde agricole d’avoir une comptabilité si compliquée aujourd’hui ? Je ne pense pas. Pourquoi embêter un paysan qui fait 150 000 euros de chiffre d’affaires et 25 000 euros de résultat avec une comptabilité si lourde ? Il est possible de la simplifier en supprimant l’amortissement dérogatoire ou en relevant le seuil d’application du régime réel des bénéfices agricoles.
Avant d’être consultant indépendant et de donner des conférences sur la révolution numérique et la prospective en agriculture, vous étiez, jusqu’à quelques années, directeur d’un CerFrance pendant vingt ans. Quel a été l’impact du numérique dans la transmission des données comptables ?
Cela a commencé il y a vingt ans avec les factures de coopératives transmises sur des bandes magnétiques. Depuis cinq ans, les relevés bancaires sont transmis par éDI (N.D.L.R. : échange de données informatisé). Ces innovations ont permis de simplifier la saisie comptable et donc de gagner du temps. Avec les nouvelles avancées, le progrès de l’intelligence artificielle, il y a une grande partie des écritures qui se feront automatiquement. Cela va amener à révolutionner les tâches des professionnels de la comptabilité. Déjà aujourd’hui, on ne devrait pratiquement plus avoir de saisie s’il n’y avait pas une certaine protection de la profession autour des postes d’assistants comptables.
Si du temps est gagné par le prestataire comptable, la facture va-t-elle diminuer pour l’exploitant ?
Pas forcément, car d’autres coûts accompagnent ces nouveaux outils : celui des logiciels et du traitement des données. Globalement, cela coûtera un peu moins cher mais ce ne sera pas le principal avantage pour l’agriculteur. Comme les écritures comptables vont s’enregistrer automatiquement, ce dernier disposera au fur et à mesure d’un tableau de bord pour piloter plus rapidement son entreprise. La comptabilité ne sera finalement qu’une conclusion du process. L’exploitant devra décider quels indicateurs il voudra suivre de manière régulière. Son choix devra se porter sur ceux qui construisent la rentabilité de son entreprise. Cela change totalement la manière d’appréhender le conseil et la gestion.