C’est la troisième année que Laurent Pinaud, agriculteur bio à Landrais, en Charente-Maritime, associe des céréales à des légumineuses. « Les rendements en blé pur n’excédaient pas 30 q/ha sur nos terres, mais atteignaient tout de même 45 q/ha après luzerne. Nous devions donc travailler sur la fourniture en azote, se rappelle l’agriculteur. Associer la féverole au blé meunier a permis de rendre disponible cet élément. Finalement, avec la moindre densité, je récolte toujours environ 30 q/ha de blé, mais je gagne 15 q/ha de féverole en plus ! » Laurent Pinaud a également gagné un point de protéines pour atteindre 11,5 %.
L’hiver 2015 ayant été très humide, le sol, argilo-calcaire, était très compacté. L’agriculteur a décidé de sous-soler puis, fin octobre 2016, de semer le mélange à la volée avec un épandeur DP12 à l’avant du tracteur et la herse étrille à l’arrière. « Avec l’épandeur à engrais, je roule à 10 km/h sur une largeur de 12 m, le chantier de semis est donc rapide et lorsqu’une pluie est annoncée, je peux semer juste avant pour favoriser la levée. »
Blé de population
Il a choisi la variété Diva en féverole, qu’il avait gardée de l’an passé à 100 kg/ha, et Rouge du Roc, un blé de population, à 140 kg/ha. « Ce blé est plus couvrant, produit plus de paille avec la même qualité meunière que Renan, note le polyculteur qui élève également 50 vaches limousines et leurs veaux. Par ailleurs, je sème la féverole un peu plus épais que la préconisation de la coop de 80 kg/ha, car le passage de la herse étrille fait parfois baisser le nombre de levées par mètre carré. »
En 2015, il avait semé à la volée la féverole, avant de labourer puis de semer le blé 10 jours après avec la herse rotative. Mais en cours de cycle, les féveroles avaient largement pris le dessus sur le blé. Cette année, c’est l’inverse, difficile de voir des féveroles dans le blé ! Impact de la technique de semis, du gel, de la sécheresse ? Difficile à déterminer. En tout cas, le pouvoir couvrant des associations vis-à-vis des adventices a mieux fonctionné avec blé + féverole qu’avec épeautre + lentillon qui partage la parcelle cette année avec pas mal de sanves. C’est d’ailleurs la sanve qui avait signé l’arrêt de mort du mélange lentille + caméline que l’agriculteur avait testé auparavant. « La graine de l’adventice étant proche de celle de la caméline, le tri était difficile, voire impossible », explique-t-il.
Laurent Pinaud s’est en effet aussi lancé dans 15 ha de grand épeautre + lentillon, dans le but de récolter ce dernier pour l’alimentation humaine. L’an passé, il a cultivé également une dizaine d’hectares d’avoine flocon pour l’alimentation humaine + féverole.
Bien régler la moissonneuse
C’est la coopérative Corab Centr’Atlantique, à Saint-Jean-d’Angély, qui propose ces contrats. « Un point délicat pour récolter ces mélanges est le réglage de la moissonneuse-batteuse », note l’agriculteur, qui a suivi une journée de formation organisée par la coopérative. Idéalement, il faut attendre la surmaturité de la céréale (12-13 % d’humidité), mais pas de la féverole (15-16 %) qui risque de casser si elle est battue trop sèche. Le réglage des grilles doit se faire comme pour récolter de la féverole pure. Ensuite, le mélange est passé au séparateur pour enlever les impuretés. Une partie du mélange est triée pour conserver la féverole comme semence pour l’année suivante. Le mélange épeautre + lentillon est nettoyé de ses impuretés, mais pas trié pour l’instant. « Cela demanderait beaucoup de temps et de manutention au risque de casser encore des graines, mais nous y réfléchissons afin de réduire les frais de triage. » Ils s’élèvent à 17 €/t pour les mélanges blé ou avoine + féverole et à 72 €/t pour l’épeautre + lentillon (lire expert).