Quand les chambres d’agriculture ne délivrent pas de conseils techniques, ce sont les organismes privés (concessionnaires, coops et négoces, Ceta, indépendants, fournisseurs de logiciels et start-up) qui s’en chargent. Selon une étude menée par Pierre Labarthe, chercheur à l’Inra et auteur du rapport européen sur le conseil agricole en France, ces organismes se divisent en deux catégories : service pour les conseillers et industrie pour les activités basées sur des logiciels.
Le conseiller doit être rentable
Les conseillers des structures privées peuvent être assimilés à des consultants. Leurs structures ne reçoivent quasiment pas d’aides de l’État et leur rentabilité dépend donc directement de leur capacité à fidéliser les agriculteurs. En outre, leur rendement est faible, avec quelques dizaines d’agriculteurs par conseiller. Par conséquent, le conseil privé favorise les activités directes au détriment de celles portant sur les expérimentations et la recherche. Il est alors totalement dépendant pour la production de référentiels techniques des partenariats extérieurs : instituts, universités, industries. Il est essentiel pour ces structures de recruter des employés hautement qualifiés. Mais le turn-over important des conseillers va à l’encontre des rapports de confiance qui doivent être créés avec les agriculteurs.
Des logiciels sans le relationnel
Le conseil s’appuie aussi sur la modélisation et les OAD (1). La rentabilité de ces activités dépend de la capacité à vendre un maximum de logiciels à une clientèle variée, tout en mobilisant peu de techniciens. Si le rendement technique est supérieur à celui du consultant, la dimension relationnelle est très limitée. La standardisation de ce modèle libère du temps pour réaliser une veille scientifique et enrichir l’offre de conseil. Ces sociétés s’inscrivent donc plutôt dans une logique « industrielle » de production.
L’émergence des nouveaux modèles de conseil débouche globalement sur une actualisation des connaissances. Mais celle-ci se déroule d’une façon d’autant plus cloisonnée qu’une partie des informations fait l’objet de droits de propriété intellectuelle et reste destinée à un public restreint, capable de fournir et mutualiser ses propres données pour bénéficier d’un OAD haut de gamme. C’est le cas, par exemple, des stations météo connectées dont l’accès aux OAD de détection des maladies est exclusivement destiné aux agriculteurs qui acceptent de partager les informations collectées par leur station.
(1) Outils d’aide à la décision.