Les luttes les plus courtes sont les meilleures. C’est en tout cas l’avis de Walter Hébert, à la tête de 650 brebis à La Croix-sur-Gartempe en Haute-Vienne. Ses lots de brebis ne luttent que pendant 13 à 15 jours à l’automne. Les premières ont débuté le 15 octobre. Elles concernent un lot de 100 agnelles et un lot de 80 brebis. Suivra un lot de 140 brebis, le 15 novembre, pour une durée tout aussi réduite. « Je ne prends aucun risque, précise toutefois Walter. Depuis mon installation en 2006, j’ai diminué le nombre de jour de la mise à la reproduction petit à petit sans détériorer le taux de fertilité. Il s’établit autour de 90 %. Je ne suis pas à l’abri d’un « accident », mais la cause est indépendante de la durée. »

« Le rythme des mises bas est régulier pendant 17 jours. »

Le but de Walter est de maîtriser son organisation. Avec une lutte de 13 jours, l’agnelage des lots s’étale sur 17 jours maximum. « Le rythme est régulier, explique-t-il. Lorsque les luttes sont trop longues, il y a des jours « creux » lors desquels rien ne se passe. C’est rageant alors que le travail s’accumule ailleurs, sur les cultures en particulier au printemps. » Sans compter qu’il est important de profiter de sa famille. « Et de regarder les matchs de la league des champions l’esprit tranquille », plaisante-t-il.

Avec une mise à la reproduction de 13 jours seulement, Walter figure parmi les cas extrêmes puisque cette durée est inférieure à un cycle. Sa prise de risque est néanmoins réduite car ses animaux mis en lutte au 15 octobre accueillent de nouveau les béliers à partir du 15 novembre pour 13 à 15 jours aussi, en même temps que le deuxième lot de brebis.

Constats de gestation systématiques

La pratique systématique des  constats de gestation 45 à 60 jours après la sortie des béliers sécurise aussi sa stratégie. Le premier contrôle de gestation a lieu début janvier. « L’outil que j’utilise me permet de dénombrer les fœtus et de dater la fécondation », précise Emma Bossis, technicienne à Sicarev coop, section Limovin. Ainsi Walter peut trier ses brebis et les réalloter en fonction de la date théorique de mise bas.

Des lots d’animaux homogènes

Malgré leurs atouts, les luttes courtes sont peu mises en pratique dans les élevages. « En les limitant à 20 jours à l’automne, voire deux cycles (34 jours) pour les plus méfiants, elles présentent un intérêt économique en plus de celui de mieux maîtriser l’organisation de son travail, souligne Emma Bossis. Un maximum de brebis sont au même stade au même moment. La constitution de lots homogènes tout au long de leur vie réduit le gaspillage alimentaire. En engraissement aussi, les lots d’agneaux sont également plus homogènes. » À l’heure où les prix des intrants flambent, ce choix technique représente un levier non négligeable pour mieux maîtriser les charges.

© Marie-France Malterre/GFA - Les agnelles ont un an à la mise en lutte. Elles pèsent au moins 50 kg ce qui conditionne les résultats de fertilité.

« Les échecs sont souvent liés à des animaux mal préparés, mal déparasités ou malades », précise Emma Bossis. La durée n’est donc pas en cause. Les brebis trop maigres, avec une note d’état corporel inférieure à 3 doivent être écartées. "La repousse de cet automne favorise la reprise de poids des animaux, explique Walter. Je n’ai pas complémenté les brebis avec les céréales". Seules les agnelles ont reçu 200 g de céréales chacune pendant 20 jours avant en guise de flushing. Ce sont les premières à entrer en lutte le 15 octobre. « Elles sont âgées d’un an et elles sont dotées d’un bon gabarit (au moins 50 kg) pour garantir les résultats, déclare-t-il. Je préfère débuter par l’agnelage des primipares, car ce sont celles qui nécessitent le plus d’attention. En fin de saison, quand la fatigue se fait sentir, mieux vaut gérer les adultes pour lesquels les interventions sont en principe mieux « cadrées » ».

La conduite alimentaire des béliers est aussi essentielle. Leur préparation commence deux mois avant le début des luttes. Ils reçoivent 200 g céréales et sont régulièrement déparasités. Leur bon état est indispensable pour viser un bon niveau de fertilité et de prolificité. « Mieux vaut qu’ils soient bien préparés car ils sont très amaigris en fin de saison », observe d’ailleurs l’exploitant.