Réautoriser un insecticide interdit pour préserver la betterave à sucre, menacée par le virus de la jaunisse, a été « une décision difficile à prendre », mais à défaut de solution d’ici six mois, « il n’y aura plus de filière sucrière en France », a averti ce mercredi 12 août 2020 la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, anciennement députée de la deuxième circonscription de la Somme.

Une dérogation temporaire

Le gouvernement a annoncé jeudi 6 août 2020 qu’il vise une modification législative à l’automne pour autoriser les agriculteurs à utiliser dès 2021 et jusqu’en 2023 maximum, sous « conditions strictes », des semences de betteraves enrobées avec des néonicotinoïdes, afin de « pérenniser » la filière sucrière française, et accompagner les betteraviers durement impactés par les pucerons.

 

Selon le ministère de l’Agriculture, il y avait urgence à agir contre la jaunisse de la betterave pour sauver le secteur qui en France, premier producteur de sucre européen, concerne 46 000 emplois. Les apiculteurs et les défenseurs de l’environnement se sont opposés à cette proposition.

 

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Une ministre « attentive à toute proposition » pour éviter la dérogation

Le 10 août 2020, la ministre de la Transition écologique avait déjà détaillé les raisons de son soutien à cette mesure dans une série de tweets.

 

« La loi n’est pas encore passée, je suis très attentive à toute proposition pour qu’on puisse éviter cela », a toutefois précisé la ministre devant la presse à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), lors d’une visite dédiée au lancement d’une charte nationale pour les plages sans déchets plastiques.

 

« Malheureusement, aujourd’hui on ne peut pas, si on veut garder une filière sucrière en France, agir de manière durable en si peu de temps », a-t-elle souligné. « Des semis vont être faits dans six mois, si on n’a pas trouvé de solution, ils ne se feront pas et donc il n’y aura pas de betteraves et il n’y aura plus de filière sucrière en France ».

 

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Pas assez de recherche, selon la ministre

« Les solutions pour qu’on n’ait plus à utiliser de néonicotinoïdes commencent à apparaître, mais ce sont des solutions qui prennent du temps », explique Barbara Pompili. Et de « regretter amèrement » qu’« il n’y ait pas eu assez de mesures claires » pour appliquer la loi biodiversité de 2016 interdisant les néonicotinoïdes.

 

« Comme il n’y a pas eu assez de recherches, assez d’alternatives, aujourd’hui on est dans le mur », a-t-elle expliqué. « Moi je veux bien qu’on dise : on ferme les sucreries de France, pourquoi pas ? Le choix qui a été fait, c’est de les garder ces sucreries. Pour qu’on ait des betteraves, il faut qu’on en plante ».

 

Elle a assuré que la décision de déroger à l’usage de certains insecticides est « très restrictive, on ne parle que des betteraves, si on a un hiver doux, on parle de limitation dans le temps, c’est-à-dire qu’on parle d’une fois, renouvelable deux fois, mais je peux vous dire que ce sera le plus difficilement possible. Je ne veux pas que quiconque puisse croire que ce n’est pas dangereux. »