Quelles solutions s’offrent au monde agricole face au changement climatique ?
« Face au changement climatique, il faut éviter de rester dans un constat d’échec. Il existe beaucoup de pistes de solutions et d’atténuations. Il faut savoir les exploiter pour rester compétitif et productif dans un cadre de souveraineté alimentaire. Les acquis de notre agriculture en France ont jusqu’à présent bien fonctionné. Il faut désormais les faire évoluer, dans un climat qui change. La science doit y contribuer. »
Quels sont les leviers ?
« Le premier levier, ce sont les adaptations génétiques. En dépit des progrès réalisés, les recherches doivent être poursuivies pour obtenir des espèces plus résistantes à la canicule et à la sécheresse. Le deuxième levier est d’amener de nouvelles espèces sur un territoire : d’ici à 2070, des oliviers pourraient être plantés en Dordogne, puisque le climat méditerranéen va s’étendre. À terme, le sorgho pourrait remplacer le maïs sur les sols les plus séchants. Quand vous plantez de l’arboriculture ou de la vigne, c’est pour 30 ou 40 ans d’exploitation. C’est pourquoi cette adaptation doit débuter maintenant. Car le changement climatique s’accélère. »
« Si on a les mêmes paysages dans 50 ans, c’est que l’on sera moins productif. On aura alors perdu des places de marché. Les enjeux sont à la fois économiques et géopolitiques. Si la France perd des marchés au niveau mondial, elle sera remplacée par des pays qui auront réalisé une transition agricole intelligente au niveau climatique. L’introduction de nouvelles espèces doit s’accompagner de nouvelles filières avec du stockage, des transformateurs, des débouchés. »
Et les pratiques culturales, quel rôle jouent-elles ?
« Sur le plan technique, l’agriculture de conservation des sols présente un réel intérêt. Elle consiste à augmenter les réserves utiles en eau. Cela signifie moins de labours, davantage de cultures intermédiaires pour éviter l’évapotranspiration, pour fertiliser les sols et stocker du carbone. Dans les prairies et les pâtures, cela peut se traduire par la plantation de haies, d’arbres pour les animaux. »
« Dans les grandes cultures, il faut travailler sur les couverts intermédiaires pour permettre au sol de se régénérer, de stocker plus d’eau. Dans le cas d’une sécheresse, on peut gagner dix à quinze jours par rapport à un champ labouré. L’exploitant peut décaler les dates de certains semis : il peut planter plus tôt un maïs pour éviter que la floraison tombe pendant des épisodes de canicule. »
Et les nouvelles technologies ?
« Le numérique offre des résultats prometteurs. Ces outils d’aide à la décision pour l’agriculteur vont lui permettre de piloter au mieux son irrigation et de déterminer la bonne quantité d’eau au bon moment. À l’avenir, les ressources en eau seront de plus en plus précieuses. Chaque goutte devra être utilisée le mieux possible. Le changement climatique ne concerne pas uniquement le monde agricole. »
« Y faire face suppose des moyens, des investissements, des modifications de pratiques : par exemple, des agriculteurs qui favorisent des cultures de saison en France, des consommateurs qui achètent localement. Toute la société doit aider l’agriculture à ne pas aller au moindre coût comme si se nourrir était devenu optionnel. Pour une transition agroécologique et climatique efficace, il faudra un soutien financier du grand public. »