Avec 514 méthaniseurs en 2022 (+ 149 par rapport à 2021), la production française de biométhane a plus que doublé en un an et représente actuellement 7 TWh. Tel est le constat dressé par les principaux acteurs de la filière des gaz renouvelables, lors d’une conférence de presse, le 8 mars 2023 à Paris.
Un potentiel de production de biogaz de plus de 70 TWh dès 2030
La filière des gaz renouvelables a ainsi déjà atteint les objectifs fixés par la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), de 6 TWh d’ici à 2030. Mais elle n’entend pas s’arrêter là. « La France possède un énorme potentiel de production de biométhane », souligne le président du Syndicat des énergies renouvelables, Jules Nyssen.
Actuellement, la France recense 660 projets d’installations. « Ceci représente un potentiel d’environ 16 TWh/an », indique Jules Nyssen. Aussi, la filière estime que le potentiel de production de biogaz pourrait atteindre 70 TWh dès 2030, soit 20 % de la consommation totale de gaz.
Dans le détail, l’industrie gazière vise 50 TWh provenant de la méthanisation, 10 TWh via les filières innovantes et 13 TWh de biogaz consommé pour la production d’électricité (cogénération).
La filière française du biogaz entend donc rehausser ses objectifs et souhaite les voir inscrits dans le cadre de la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévue en 2023.
Un manque de visibilité et de mesures concrètes
En 2022, la filière a accueilli favorablement les mesures réglementaires mises en place pour faire face aux effets conjugués de la crise du Covid et de l’inflation comme la ré-indexation du tarif d’achat du gaz, l’augmentation de la validité des contrats de 18 mois ou la parution du premier texte réglementaire actant la mise en œuvre des certificats de production de biogaz (CPB).
Néanmoins, depuis la fin de 2020, « le nombre de nouveaux projets n’a qu’à peine compensé les projets abandonnés dans la file d’attente », souligne Laurence Poirier-Dietz, directrice générale de GRDF. Les conditions économiques n’étant plus réunies, de nombreux projets restent bloqués dans les premières étapes du registre des capacités et freinent l’émergence de nouveaux projets.
Pour permettre l’émergence de nouveaux projets, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) et les opérateurs gaziers ont besoin d’un cadre économique et réglementaire stable et demandent donc la mise en œuvre rapide de mesures fortes.
Parmi ces mesures :
- La révision du tarif d’achat du biométhane qui a été mal calibré en 2020, et qui ne tient pas compte de l’inflation (notamment l’augmentation des prix de l’électricité). Aujourd’hui compris entre 90 et 120 €/MWh, la filière souhaite rehausser à 120-125 €/MWh le prix à la production de biométhane.
- La publication du décret d’application des certificats de production de biogaz (CPB) imposant aux fournisseurs un taux minimum d’incorporation de gaz renouvelable dans leurs portefeuilles clients. Pour la filière, la fixation immédiate d’une trajectoire d’obligation permettra ainsi de redonner une visibilité à moyen terme pour le développement des projets.
- L’extension aux gaz renouvelables du fonds de garantie sur les contentieux de projets d’énergies renouvelables électriques.
Des filières innovantes complémentaires
« Hormis la méthanisation, il existe des filières innovantes complémentaires telles que la gazéification hydrothermale, la pyrogazéification ou l’électrolyse avec ou sans méthanation », indique Thierry Trouvé, directeur général de GRTgaz.
Pour la filière, la loi d’accélération des énergies renouvelables a ouvert de nouvelles perspectives et ces filières font désormais l’objet de nouveaux projets en France et en Europe.
Selon Thierry Trouvé, la production de gaz renouvelable et bas carbone (hors hydrogène) en France pourrait donc atteindre 60 TWh dès 2030 et 320 TWh à l’horizon de 2050. « Pour la seule pyrogazéification, les projets recensés en 2022 représentent déjà 4 TWh de potentiel de production avec 49 projets en injection. »
Les opérateurs gaziers souhaitent aujourd’hui financer ces filières innovantes via les premiers contrats d’expérimentation pour sécuriser et relancer le développement des gaz renouvelables. « La filière est prête et a maintenant besoin d’un soutien économique », indique Jules Nyssen.