À l’heure où le consommateur est à la recherche de produits sains et locaux, les yaourts de la ferme d’Ana-Soiz à Val d’Anast, en Ille-et-Vilaine, ont trouvé leur marché auprès de la restauration collective et des magasins situés dans un rayon de 80 km. Derrière cette marque, il y a une agricultrice, Anne-Soizic Liger, son conjoint Yoann, producteur de lait de vaches, et une équipe de huit personnes. En 2012, elle décide de rejoindre son mari, qui a repris l’exploitation de ses beaux-parents en 2005 et l’a convertie à l’agriculture bio en 2010. « Après cette première étape, nous voulions aller plus loin dans la valorisation de nos produits. L’objectif était de reprendre la main sur la matière première. »

Une étude de marché

« En revenant sur l’exploitation familiale, je voulais créer ma propre activité », explique Anne-Soizic, après une première carrière comme responsable administrative et financière dans une association d’insertion professionnelle. L’idée de créer une yaourterie s’est imposée après avoir réalisé une étude de marché sur le territoire. « À l’époque, on parlait de produits locaux, mais ce n’était pas encore ancré dans les têtes comme aujourd’hui. »

L’agricultrice fait le choix de la gamme ultra-frais : yaourts, crème dessert, fromage blanc. Elle arrête de travailler et reprend des études agricoles pour obtenir un Brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole (BPREA), option transformation des produits laitiers, à Pontivy (Morbihan), en un an. En parallèle, le couple commence à démarcher auprès des écoles, des magasins spécialisés en bio, des épiceries et des grandes et moyennes surfaces (GMS). Dès le départ, les éleveurs excluent de vendre sur les marchés, trop gourmands en temps.

Le terroir, c’est leur marque de fabrique. Avec l’aide d’une agence de communication, ils créent la marque Ana-Soiz qui fait référence au prénom de l’agricultrice et au territoire de Val d’Anast. Elle s’installe en septembre 2013. Une yaourterie de 130 m² est aménagée au-dessus de la salle de traite pour un coût de 160 000 €. « Nous avons commencé par une cuve de 100 litres et les pots étaient conditionnés à la main. » Au fur et à mesure du développement de l’atelier et de la gamme de produits, le matériel s’est étoffé et, aujourd’hui, le conditionnement est automatique.

Un premier salarié a été embauché pour l’élevage car Yoann, ancien commercial de métier, passait de plus en plus de temps à la vente. « Il y a toute une éducation à faire auprès des cuisiniers, mais aussi des enfants qui ne sont pas habitués au nouveau produit. Que ce soit au niveau de la restauration collective ou du grossiste, c’est plus simple de travailler avec un seul fournisseur que d’appeler différents producteurs locaux », confirme-t-il.

En mars 2015, la ferme d’Ana-Soiz intègre le réseau « Invitation à la ferme », en cours de lancement à ce moment-là, qui regroupe des exploitations laitières bio en vente directe, de la France entière. « Nous étions la cinquième ferme à y adhérer, aujourd’hui le groupe en rassemble trente et une. » Nous partageons toutes un cahier des charges commun. Les vaches reçoivent plus de 70 % d’herbe dans leur ration. Elles passent plus de sept mois dans les prés et les robots de traite sont exclus. Les yaourts sont fabriqués avec le lait de la ferme qui n’est ni standardisé, ni homogénéisé pour garder ses qualités nutritionnelles. Les ingrédients sont sélectionnés (cacao, sucre équitable et arômes bio).

De l’emploi local

Confectionnés sur place, les produits sont vendus en direct et en local. Le réseau a accéléré leur développement (lire encadré ci-contre). « Lors de mon installation, j’ai fait mon prévisionnel avec 60 000 l de lait transformés, au bout de cinq ans. Nous en sommes à 230 000 l », se réjouit l’agricultrice.

La ferme produit actuellement 30 000 yaourts par semaine, distribués dans les écoles, lycées, maisons de retraite, crèches, restaurants d’entreprise, épiceries, magasins spécialisés et GMS. Le couple dispose de son propre camion et livre ses produits deux jours par semaine au plus près. Des transporteurs se chargent des clients plus éloignés. Les éleveurs sont fiers d’avoir pu créer de l’emploi local : « Trois de nos salariés sont venus habiter dans la commune. C’est autant de familles qui vivent sur le territoire. » Isabelle Lejas