Les opérateurs de marché n’ont guère de nouvelles informations à se mettre sous la dent cette semaine, ce qui conduit à un calme plat du côté des prix des céréales françaises.

Blé : la bataille pour le Maroc commence

C’est le calme plat sur le marché du blé, avec la Russie qui continue de dérouler ses exportations records (près de 17 Mt de blé déjà chargées depuis juillet, soit plus de la moitié de la prévision d’exportation totale pour 2017-18). La machine ne montre pour l’instant aucun signe d’enraiement, et il faudrait vraiment de mauvaises conditions dans les ports de la mer Noire et d’Azov ou que la situation s’envenime autour du mystère des fuites de ruthénium détectées dans le sud de l’Oural pour freiner les exportations russes.

Ce flux continu maintient la pression sur les cours mondiaux, et les prix français restent cloués au plancher. Le rendu Rouen se maintient ainsi juste en dessous des 155 €/t, tandis que le contrat décembre Euronext s’effrite (–0,75 €/t) à 158 €/t. Le top départ a été donné pour la campagne d’importation du Maroc, dans la perspective tout proche (en décembre) de la baisse de la taxe d’importation appliquée par ce pays. Les premiers bateaux de blé français ont ainsi été chargés au cours des jours derniers, mais il va falloir compter avec la concurrence de la mer Noire et des USA.

Sur le front des prochaines récoltes, aucune alerte à signaler. Certes, la moisson australienne (réalisée à 40 % environ) sera loin du record de l’an passé, et les conditions sont plutôt sèches actuellement sur les zones de production US du Hard Red Winter (mais il est encore bien trop tôt pour en tirer des conclusions définitives sur le potentiel de rendement). En France, les blés affichent de très bonnes conditions. Du côté des importateurs, la situation reste préoccupante au Maroc, qui réalise ses semis dans un contexte très sec. En revanche, des pluies bénéfiques sont arrivées en Algérie et en Tunisie. Rien ne favorise donc pour l’instant l’émergence de facteurs susceptibles de faire remonter fortement les cours, tandis que les exportations argentines montent en puissance vers l’Asie et l’Afrique, confirmant le fort potentiel d’agressivité de la récolte qui s’achève dans ce pays.

L’orge fourragère fait du sur place

À l’instar du blé, l’orge fourragère reste stoïque sur l’ensemble des places. Elle est cotée à 151 €/t en rendu Rouen et 146,5 €/t sur le Fob Moselle (–0,5 €/t dans les deux cas depuis la semaine dernière). Les principales concurrentes des orges françaises ont vu leur prix baisser au cours de la semaine, puisque les orges ukrainiennes et russes ont perdu 1 $/t à 1,5 $/t, à respectivement 191,5 $/t et 192 $/t (contre 185 $/t pour le Fob Rouen). Les orges mer Noire ont mis fin à deux mois de hausse régulière, relançant la course à la compétitivité, alors même que l’Arabie Saoudite vient de passer un appel d’offres pour 720 000 tonnes (chargement janvier-février). Les orges de brasserie ont été soutenues et ont gagné 1 €/t, tant en orge de printemps (197 €/t) qu’en orge d’hiver (157 €/t).

Maïs : les jours se suivent et se ressemblent…

Les maïs sud-américains se sont autorisés un petit rebond cette semaine, l’origine brésilienne regagnant 9 $/t Fob et l’Argentine 5 $/t. Ce sursaut est alimenté par la rétention des agriculteurs brésiliens ainsi que par les craintes (encore extrêmement hypothétiques) d’un retour du phénomène climatique la Niña qui pourrait se traduire par une séquence de sécheresse dans la région. Néanmoins, ces deux origines restent compétitives sur l’échiquier mondial et, compte tenu des exportations déjà réalisées, le maïs brésilien va devoir passer progressivement le relais à d’autres pays.

Un raffermissement des prix est en revanche un luxe que le maïs français ne peut pas se permettre. Sous la pression de la récolte qui vient de s’achever, les cotations françaises perdent 2 à 4 €/t, avec un Fob Bordeaux qui passe sous la barre des 150 €/t. Il faudra toutefois suivre le retard pris par les récoltes en Pologne du fait des pluies qui se sont abattues sur le pays.

La prime de risque s’accroît sur les prix du soja

Avec la fête de Thanksgiving aux USA, le marché à terme de Chicago était fermé hier. Les prix en début de semaine ont augmenté, tirés par l’annonce de l’opérateur chinois Cofco d’une prévision d’importation de 100 millions de tonnes (Mt) de soja pour le géant asiatique. Cet élément, de nature à tirer les ventes US, ainsi que la persistance d’un risque de sécheresse en Amérique du Sud (liée au phénomène climatique La Niña) ont donc porté les cours du soja cette semaine. Ceux-ci gagnent ainsi un peu plus 9 $/t sur le rapproché (échéance janvier 2018). Cependant, les ventes US restent très en retard et les prix nord-américains ne sont pas compétitifs sur janvier-juin. Sauf accident sur les récoltes au Brésil et en Argentine, les prix devraient donc reculer à l’arrivée des volumes sud-américains sur le marché mondial au début de l’année prochaine.

La baisse des prix du colza s’accentue

De nouveau cette semaine, les prix du colza reculent sur le marché français. Le prix rendu Rouen perd ainsi 6 €/t, tandis que le colza Fob Moselle voit son prix reculer de 4,5 €/t. Les cours sur Euronext reculent pour leur part de 4,75 €/t, à 374,25 €/t.

La nouvelle hausse de l’euro face au dollar explique pour moitié cette baisse des prix français. De plus, la correction à la baisse des prix de l’huile (après la forte hausse observée en octobre) entraîne dans son sillage ceux de la graine de colza.

Le cours du canola canadien est en très légère baisse cette semaine, soutenu par des chiffres mensuels de trituration record en octobre.

Le prix du tournesol est en hausse de 5 €/t cette semaine, à 320 €/t à Saint-Nazaire, avec une révision en baisse des rendements dans les pays de la mer Noire, ce qui soutient les cours mondiaux.

Les prix des tourteaux repartent à la hausse

Avec les craintes sur la production argentine (premier exportateur de tourteau au monde), le tourteau de soja sur le CBOT regagne environ 15 $/t. Cela tire à la hausse les prix français, avec la cotation à Montoir qui remonte de 13 €/t cette semaine.

Le prix du pois fourrager est en baisse de 5 €/t à 175 €/t départ Marne, tandis que le prix du pois jaune rendu Rouen chute lourdement à 183,5 €/t (–11,5€/t).

A SUIVRE : pluies en Amérique du Sud (et risque de sécheresse en lien avec la Niña), conditions de développement des blés aux USA et en Afrique du Nord, avancée de la récolte de blé en Australie et en Argentine (volumes et qualité), récolte et exportations de canola en Australie, taux de change.

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