La semaine écoulée a pris des allures de round d’observation sur le marché mondial des céréales, tandis que la compétition pour l’exportation conduit à un marquage serré entre les différentes origines. Seul le maïs français en façade atlantique a vu ses prix rebondir.

Blé : la France sous la menace des US et de l’Argentine

En blé, les prix des principales origines mondiales n’ont guère évolué cette semaine, tandis que les différents compétiteurs se retrouvent dans un mouchoir de poche, ce qui annonce une bataille féroce à l’exportation. Si le rendu Rouen a grignoté 1 €/t depuis la semaine dernière, c’est principalement grâce au coup de pouce de la Banque centrale européenne, dont les dernières déclarations ont affaibli l’euro face au dollar. Après être passé sous le prix du blé russe à 12,5 % de protéines, le prix du blé français Fob Rouen exprimé en dollar fait désormais jeu égal avec le blé russe à 11,5 % de protéines, l’un de ses principaux compétiteurs sur l’Afrique du Nord.

Avec un débouché égyptien dominé par la Russie et qui semble actuellement quasi inaccessible au blé français, ce dernier doit s’assurer de bonnes parts de marché sur le Maroc et l’Algérie pour éviter la constitution de gros stocks en fin de campagne. Or, le blé tricolore est menacé sur le Maroc par le HRW états-unien, qui a vu ses prix baisser suffisamment pour espérer empocher une bonne part de la demande marocaine (au moins dans le cadre du quota à droit réduit réservé au blé US). L’origine française est également au coude-à-coude avec le blé argentin sur l’Algérie. Plus de 200 000 tonnes auraient déjà été chargées depuis août au départ de l’Argentine sur cette destination.

Rien ne permet donc au blé hexagonal de repartir franchement à la hausse. Le contexte mondial reste sous la coupe d’amples disponibilités. L’amélioration des conditions climatiques aux États-Unis, où les semis de blé d’hiver sont en cours, n’arrange pas les choses en accentuant la pression sur les cours du HRW. Cerise sur le gâteau, les Australiens se sont décidés à entrer dans la compétition. Les premiers contrats de la nouvelle récolte (qui battra son plein d’ici à quelques semaines) commencent à se nouer à destination de l’Asie grâce à des prix en nette baisse. L’an passé à la même date, plus de 3 millions de tonnes de blé australien étaient déjà engagées. Les producteurs étaient jusqu’ici très réticents à baisser les prix du fait de la sécheresse qui a sévi sur l’Australie.

Orge : un marché sans gaz

Dans le sillage du blé, le marché de l’orge fourragère n’a guère varié depuis la semaine dernière, avec un rendu Rouen à 152 €/t. Et comme en blé, l’orge française et les origines mer Noire se tiennent par le maillot afin de tenter d’engranger des parts de marché à l’exportation. Du côté de l’orge de brasserie, les variétés de printemps cèdent un petit euro Fob Creil, à 198 €/t, tandis que les variétés d’hiver ont stoppé la baisse entamée il y a trois semaines, à 155 €/t.

Maïs : rebond sur la façade atlantique, mais pour combien de temps ?

L’avancée de la récolte aux États-Unis confirme que le pays disposera de larges disponibilités en maïs cette année, s’ajoutant à la récolte pléthorique sud-américaine. Le retard pris par les chantiers de récolte par rapport à la moyenne va donc seulement repousser l’échéance d’une nouvelle mise sous pression du marché.

Dans ce contexte, les prix mondiaux n’évoluent guère depuis la semaine dernière. Seuls les prix de la façade atlantique, en France, ont connu un sursaut significatif, le Fob Bordeaux retrouvant son plus haut niveau depuis un mois à 151 €/t (+8 €/t en sept jours). Ce rebond s’explique par le regain de compétitivité qu’avait connu cette origine ces dernières semaines, notamment à destination du nord de l’UE, conduisant au chargement de quelques navires.

Toutefois, le niveau de prix actuel met à nouveau le maïs français hors jeu par rapport à la concurrence, ce qui laisse supposer que l’embellie sera de courte durée. Les flux de maïs brésiliens continuent à un rythme inhabituellement élevé vers l’UE, et l’Ukraine va bientôt pouvoir prendre le relais : les coupes dans ce pays dépassent désormais la moitié des surfaces à récolter.

Prix du colza en hausse

Soutenu principalement par une remontée des cours des huiles végétales, le colza voit son prix rebondir sur le marché français. Le prix rendu Rouen augmente de 7 €/t, tandis que le colza Fob Moselle se renchérit de 2 €/t. L’échéance de novembre 2017 sur Euronext remonte également, de 2,50 €/t à 369 €/t. Le prix des huiles s’est redressé, tiré par l’huile de palme. En effet, le développement du phénomène climatique La Niña soulève la crainte d’un ralentissement de la production d’huile de palme sur la fin de l’année 2017.

L’huile de soja a également vu ses cours remonter cette semaine, portés par l’annonce de l’EPA (agence américaine de l’environnement) le 20 octobre dernier qu’elle ne diminuerait pas les niveaux d’incorporation obligatoire de biocarburants, malgré la mise en place de droits anti-dumping très élevés sur les flux de biodiesel en provenance de l’Argentine et de l’Indonésie en août dernier, limitant les importations et les volumes disponibles sur le marché US.

Le cours du canola canadien est au contraire en recul de 5,50 $/t cette semaine, uniquement sous l’effet de l’affaissement de la valeur du dollar canadien. Sur le marché local, la forte demande a plutôt tiré les prix en légère hausse (+7 CA$/t).

Le prix du tournesol reste stable à 320 €/t à Saint-Nazaire.

Soja et tourteaux s’affaissent

Avec une progression rapide de la moisson aux USA ces derniers jours (qui rattrape presque la moyenne quinquennale), et les bons retours sur les rendements récoltés, les prix du soja et des tourteaux de soja sont en recul sur le marché US comme sur le marché européen. Ainsi le soja sur le CBOT perd 5 $/t sur l’échéance de novembre 2017. À la suite du soja, le tourteau de soja sur le CBOT perd 10 $/t, et la cotation à Montoir recule de 7 €/t sur la semaine.

En Argentine, les semis de soja viennent de démarrer. La culture oléagineuse devrait voir sa surface reculer cette année, en partie à cause des inondations ayant fortement touché les principales zones de production, notamment dans le sud et sud-est du pays, et en raison d’une perte d’attractivité face aux céréales. Au Brésil, les semis sont faits à 20 % des intentions, en ligne avec la moyenne des cinq dernières années. Des pluies significatives ont arrosé les principales zones de production ces derniers jours, réduisant un peu le déficit hydrique. D’autres précipitations sont attendues et devraient permettre aux semis brésiliens de se dérouler dans des conditions correctes, à défaut d’être idéales.

Prix du pois stabilisé

Le prix du pois fourrager reste coté à 185 €/t départ Marne. A ce prix, le pois fourrager n’est plus très loin d’être attractif dans les rations porcines. Il conserve néanmoins encore un potentiel de baisse, qui devrait se renforcer si les conditions climatiques sont correctes pour le développement du soja dans les prochains mois en Amérique latine.

Le pois jaune rendu Rouen reste coté à 197 €/t, stable depuis presque un mois.

A SUIVRE : volume et qualité de la récolte de blé argentine, impact de la sécheresse sur la récolte australienne de blé, volume définitif de la récolte de maïs US, semis de soja au Brésil et en Argentine, avancée de la récolte de soja aux USA et de canola en Australie, production d’huile de palme en Asie du Sud-Est, taux de change.

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