Faisant suite aux nombreux dysfonctionnements ayant entaché le rappel des produits infantiles potentiellement contaminés par Salmonella agona, les députés avaient décidé la création de la commission d’enquête parlementaire. Cette dernière a rendu publiques ses préconisations ce mercredi 18 juillet. Le rapporteur de la commission, le député Grégory Besson-Moreau (LREM) et le président Christian Hutin (apparenté socialiste) ont souligné qu’ils souhaitaient voir ce rapport aboutir rapidement à une proposition de loi.

Pour Grégory Besson-Moreau, les explications de Lactalis sur l’origine de la contamination « ne collent pas ». Il a aussi découvert au fil des auditions que l’ensemble de la chaîne avait « déraillé » durant cette crise. Les préconisations de la commission d’enquête parlementaire visent donc « chacun des maillons », depuis les industriels jusqu’aux distributeurs en passant par les services de l’État, a-t-il souligné.

Un système d’autocontrôles insuffisant

Pour éviter les problèmes sanitaires dans l’industrie agroalimentaire, « l’autocontrôle n’est pas suffisant », avait déclaré plus tôt Christian Hutin, à l’antenne d’Europe 1, assurant qu’il fallait « contrôler les contrôleurs, et contrôler les contrôlés » et demandant de vérifier l’indépendance des laboratoires. La commission préconise aussi de « toucher au portefeuille » les industriels qui « ne respecteront pas une forme de déontologie et de rigueur sur les autocontrôles ».

La commission propose aussi de remettre en cause la délégation de pouvoir en matière sanitaire. Pour Grégory Besson-Moreau, « un président d’une industrie agroalimentaire est un justiciable comme tout le monde. Il doit répondre devant un juge de ce qu’il fabrique, ce n’est pas aux directeurs d’usines de répondre ».

« Armée mexicaine »

Il faut aussi que l’État mette fin à la « guerre des polices » et crée une autorité unique dans le domaine de la sécurité alimentaire, transférée au ministère de l’Agriculture. Les députés dénoncent une « armée mexicaine » avec « trois ministères (impliqués) : la Santé, Bercy (ministère de l’Économie et des finances, NDLR) et l’Agriculture. […] Il faut que ce soit très clair : un numéro unique, un site unique, une décision unique », précise Christian Hutin. Les deux députés illustrent cette situation avec le fait qu’à l’heure actuelle, « la Direction générale de la santé et la Répression des fraudes (DGCCRF) travaillent chacune de leur côté à la mise en place d’une application (informatique, NDLR) différente, destinée à prévenir les citoyens lors de crises sanitaires, alors qu’elles auraient pu, ou dû, joindre leurs efforts ».

Pour cela, ils devront lever les réticences des différents ministères…. En effet, lors de son audition devant la commission d’enquête, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’était dit « opposé » à toute idée de rassemblement de la Direction générale de l’alimentation (DGAL, ministère de l’Agriculture) et de la DGCCRF, tout en réclamant l’établissement d’une « chaîne hiérarchique » unifiée sous le contrôle de Bercy en cas de crise.

Nouvelle redevance sur les industriels

Le rapport entend aussi trouver des fonds pour garantir une meilleure efficacité des services de l’État, grâce à une nouvelle redevance sur les industriels, votée au niveau européen, dont le produit de 270 millions d’euros sera « automatiquement transféré à la DGAL », selon M. Moreau-Besson. Cette somme pourrait, selon le rapporteur, permettre la création de « 800 emplois en équivalent temps plein ».

Des « stress-test » pour la procédure de retrait/rappel

Concernant la procédure de retrait et de rappel, qui s’était avérée défaillante durant la crise Lactalis, le rapport suggère plusieurs pistes : des « stress-tests » comme pour les banques, le remplacement des codes à barres par des codes QR pour faciliter les blocages à la caisse, et la formation du personnel.

Il demande également qu’un employé par magasin « soit responsable de la santé publique ». « Dans les cas de risque sanitaire grave et avéré, incluant l’hypothèse d’un acte terroriste d’empoisonnement, tous les moyens doivent pouvoir être mobilisés pour contacter les clients, y compris les données bancaires », a ajouté Christian Hutin.

D’après l’AFP